Quelle est la question qu’on vous a trop souvent posée ?
Gilles Vardon : Pour moi ce serait "Ça va ?"...
Guillaume Ricard : Je suis sûr que je vais trouver pendant l'interview (Rires) !
L’artwork de la pochette est magnifique, comment s’est passé le travail sur ce visuel ?
Guillaume : Assez simplement en fait. Tout comme pour le premier album, c'est Hicham Haddaji des studios Strychneen qui a réalisé tout l'aspect visuel de "Let's Face It".
On a commencé à travailler à partir de trois informations nécessaires selon moi :
1.les premiers enregistrements des futures chansons,
2. les paroles déjà écrites,
et 3. le concept complet de l'album, car oui "Let's Face It" raconte une histoire, il s'agit d'un album concept.
Quel est le lien entre l’ampoule de la pochette et cet album ? Doit-on comprendre que les membres d’Ommatidia sont des lumières (Rires) ?
Gilles : Olivier surtout.
Guillaume : Alors oui, je confirme pour Olivier, surtout que, à la base, il est censé se déguiser en ampoule pour les concerts...
Plus sérieusement, on voulait quelque chose de différent du premier, quelque chose de plus rock, plus catchy, et surtout pas de nana nue ;)
L'idée de l'ampoule vient du concept que j'ai écrit. Dans le cadre de ce concept, j'utilise énormément le champ lexical lié à la lumière, au soleil etc... Quoi de plus représentatif qu'une ampoule pour illustrer cette notion dans un monde moderne, monde dans lequel évolue mon personnage principal ?
Concernant la mouche, c'est une référence directe au nom du groupe; les ommatidies étant les multiples facettes qui composent les yeux des insectes, ici une mouche. On a trouvé le côté "mouche cramée" assez fun, et finalement ce côté fun correspond bien au groupe, même si cela ne transparaît pas dans la musique.
La musique d’Ommatidia semble très froide, assez doom ou gothique dans l’esprit, est-ce une nécessité pour vous ?
Gilles : On pouvait assimiler le groupe à ces mouvements pour le premier album, mais avec "Let’s Face It" on n’est plus dans cet esprit, je dirais. Les influences de chacun sont assez différentes et ça enrichit la musique vers quelque chose de moins "fermé". J’aimerais que l’on nous classe dans le "Metal" au sens large.
Guillaume : Sur "Let's Face It", le côté doom vient de Nicolas, mais il est contrebalancé par les influences plus rock/pop mais aussi thrash de Gilles. Olivier y a apporté un jeu très riche dont il est l'auteur à 100%. De mon côté, j'apporte effectivement un côté gothique mais aussi grunge et pop.
Je pense que cet album restitue parfaitement le mélange de nos multiples influences.
Dans ce sens, doit-on voir la filiation avec votre précédent groupe The Old Dead Tree ?
Guillaume : Alors, déjà et même si on a bien rigolé avec Vincent, il ne fait plus partie du groupe, donc seul Nicolas est issu de cette ancienne formation. Il n'y a en tout cas absolument aucune volonté de notre part de filiation avec The Old Dead Tree que, personnellement j'aime beaucoup, mais qui ne correspond pas à la musique que j'ai envie de créer avec Ommatidia. Je pense vraiment qu'avec ce disque, les réminiscences de The Old Dead Tree s'éloignent, et c'est tant mieux. Avec ce disque, Ommatidia prouve qu'il a une vraie personnalité, sa personnalité à lui. Beaucoup de gens ne s'y retrouvent pas car ils attendaient une suite de TODT, et c'est tant mieux.
Est-ce que cette filiation, ce rapprochement n’est pas trop lourd à porter pour Ommatidia qui comme tout nouveau groupe sera comparé pour être situé ?
Guillaume : Si, ça nous pèse quand même, car ça rend les choses plus difficiles pour nous, je pense que l'on souffrira toujours de la comparaison ; on doit l'accepter. Je pense que ça arriverait sur le tapis même si on virait Nicolas : ce qui n’est pas prévu, je précise (Rires)… Sinon, c'était quoi la première question déjà... ah tiens je sais quoi répondre maintenant (Rires)
Toujours à propos de The Old Dead Tree, il semblerait que seul Nicolas ait participé à la reformation, pourquoi Vincent n’a pas rejoint les rangs de cette réunion ?
Guillaume : Vincent a eu des obligations professionnelles qui ont fait qu'il ne pouvait pas se consacrer au groupe dans le cadre de la tournée de TODT.
Enfin, le projet Ommatidia a vraiment vu le jour à la séparation de The Old Dead Tree ; est-ce que la réunion scénique qui pourrait évoluer sur un nouvel album du projet de Nicolas et Manuel pourrait être un frein dans l’évolution de Ommatidia ?
Guillaume : Absolument pas. Plusieurs choses sont claires et nettes.
1. La priorité musicale de Nicolas est et restera Ommatidia.
2. Une reformation définitive et la composition d'un nouvel album de TODT n'est pas d'actualité.
Question évolution, le premier album "In This Life, Or The Next" a été particulièrement peaufiné, particulièrement bien accueilli par la presse à sa sortie… Pourquoi avoir attendu 4 ans avant de proposer son successeur ?
Guillaume : On avait terminé sa composition et son enregistrement bien avant ; mais on n’avait pas trouvé de deal de distribution intéressant. Tout ça accompagné de la recherche d'un bassiste pour les concerts (suite au départ de Vincent) a fait que l'album n'a pas pu sortir en 2014 comme on l'aurait souhaité, mais l'enregistrement de "Let's Face It" a été terminé il y a deux ans.
Ne pensez-vous que ce délai est rédhibitoire pour tout groupe qui souhaite s’installer sur le long terme et nouer un lien de fidélité avec son public ?
Guillaume : Oui, c'est sûr, mais bon on ne fait pas de la musique pour la célébrité, et encore moins pour l'argent. On fait de la musique parce que c'est une passion. Après les gens prennent ou pas, oublient ou pas...
Vous aviez mis les petits plats dans les grands pour la sortie "In This Life, Or The Next" avec notamment le mastering signé par Jens Bogren (Opeth, Symphony X, Paradise Lost, PoS, Soilwork…). Pourquoi ne pas avoir fait appel à lui pour "Let’s Face It" ?
Guillaume : Parce que "Let's Face It" sonne très bien, et sans contestation possible, mieux que l'album précédent. Pour être tout à fait honnête, c'est juste le nom collé dessus qui est intéressant, le travail sur le mastering en lui même...
Pour ce second album, ça nous a couté moins cher et le résultat est là, c'est tout ce qui compte, et en plus on a travaillé uniquement en France.
On a l’impression que vous aviez vu trop grand pour votre premier album, impliquant des remises en question et donc du temps pour sortir le deuxième et faire appel à des moyens plus limités (sans faire injure à Mobo des Conkrete Studio qui a quelques beaux projets dans sa liste notamment Loudblast, Gnö…) et que "Let’s Face It" est l’album du retour sur terre ?
Guillaume : Comme je le disais tout à l’heure, il suffit d'écouter l'album pour se convaincre qu'on a fait le bon choix.
Gilles : Cet album avait pour but de se démarquer de l’étiquette de The Old Dead Tree et ses moyens plus modestes reflètent en effet un esprit plus terre-à-terre par rapport à 'In This Life Or The Next'. Ce premier album bénéficiait d’un soutien conséquent dû aux attentes de Season Of Mist et il est évident que le temps de gestion et la création du nouvel album se sont faits de manière plus détachée.
Votre musique est pleine de variations, comment s’est passé l’étape de la composition ?
Gilles : Les morceaux sont d’abord apparus sous forme de démos relativement brutes, apportées par Nico et moi, puis les structures et arrangements se sont faits en répétition.
Comment s’est passée l’étape de la composition, est-ce que la guitare est à la base des compositions ?
Gilles : Nico et moi composons naturellement à la guitare puis nous soumettons nos idées aux autres membres du groupe.
Guillaume : Pour cet album, je me suis pleinement impliqué dans la composition, les structures et les arrangements, à partir des démos de Gilles et Nicolas. On a écrit les chansons en se référant à l'histoire que je souhaitais raconter. Les rebondissements de l'histoire ont permis de définir les types de morceaux à écrire à certains moments du disque.
J'ai ensuite incorporé les paroles définitives à partir des différentes étapes de l'histoire.
La guitare est d’un excellent niveau, avec beaucoup d’interventions en solo, si on ajoute les liens avec Jens Bogren sur le premier album, Ommatidia est un groupe affilié au metal progressif, est-ce une source d’inspiration pour vous ?
Gilles : Personnellement je n’écoute pas vraiment de musique progressive, mais beaucoup de musiques différentes. J’imagine que cela se ressent dans les compositions et par conséquent certains affilient Ommatidia au metal progressif.
Guillaume : je pense que c'est dû au fait que, même si on aime le côté pop et catchy d'un couplet/refrain; on n’aime pas non plus les mélodies faciles et les structures trop évidentes.
Pour ma part, en revanche, plus je vieillis et plus je me retrouve dans ce style musical; j'ai besoin de plus en plus de trouver une certaine complexité dans la musique. Mon dernier coup de cœur en métal progressif, c'est Leprous.
Justement on sent que l’album est aux portes du progressif, pourquoi ne pas avoir sauté à pieds joints dedans ?
Gilles : Ah non alors (Rires) ! Même si certains passages ou arrangements peuvent sonner "progressif", on ne s’est jamais considéré comme tel. L’approche du groupe a plus que jamais été d’être directe avant tout. On a ce côté plus rock’n’roll dans les structures des nouveaux titres, les durées des morceaux se sont également considérablement raccourcies.
Guillaume : Peut-être dans quelques années, mais ce ne sera jamais du progressif technique, toujours au service de la mélodie et des émotions à faire passer.
En revanche, la voix est plus en retrait comme si seule comptait la musique, était-ce une intention de votre part ?
Guillaume : Je dois t'avouer que je suis très étonné par cette remarque. Car, pour moi, sur cet album, c'est résolument le chant qui est en avant au niveau du mixage, et c'était même un choix délibéré. Après, connaissant Nicolas, il a du vouloir augmenter le volume de sa rythmique, et m'a filé une copie avec le chant en avant juste pour moi... damnit !
La voix témoigne aussi d’une grande fragilité, était ce nécessaire pour vous de mettre en lumière ce contraste ?
Guillaume : Mais je suis une petite chose fragile, c'est pour ça. Comme je le disais, l'idée c'est de mettre en avant les émotions et j'ai travaillé en ce sens, en hésitant pas à me mettre en danger vocalement, Bootz (qui a enregistré toutes mes voix et a mixé l'album) des "Liens du son" m'a beaucoup aidé dans cette exploration et je l'en remercie infiniment. C'est à dire à passer les sentiments de la manière la plus honnête possible, sans avoir rien à perdre. De plus, le fait de raconter une histoire m'a forcé à jouer davantage mes textes surtout sur des titres comme "Coming Full Circle".
Le maître mot de cet album semble être subtilité. Sous un habillage puissant et épais se cache une musique subtile (comme Paradise Lost), et très humaine au final. Est-ce que pour vous la musique doit être baignée de subtilité ?
Guillaume : Ah oui, à 200%. J'aime peaufiner les choses jusqu'au moindre détail, même si les gens ne le verront probablement jamais. Par exemple, les titres des chansons illustrent toutes un dégradé imagé du blanc au noir; mais je suis sûr que personne ne le remarquera jamais; moi ça me fait plaisir en tout cas.
La réflexion est au cœur de notre création musicale, et j'y veille personnellement.
Comment s’est passée votre rencontre avec Dooweet ? Est-ce que vous êtes fiers de faire partie de cette écurie ?
Guillaume : Très bien, j'avais entendu parler de Dooweet depuis longtemps; et suite à l'arrêt de la collaboration avec Season of Mist, leur offre était intéressante et correspondait à nos besoins pour ce deuxième album. Les retombées sont encore trop peu nombreuses pour l'instant mais comme on dit l'union fait la force; et c'est agréable de faire partie d'un collectif comme Dooweet.
Quel message souhaitez-vous faire passer ?
Guillaume : Résolument, que Ommatidia est là, que TODT c'était très bien mais c'est terminé (Rires)) et que notre personnalité est unique.
Qu’attendez-vous de cet album ?
Guillaume : De bonne chroniques, et avec l'apport de Dooweet, une ouverture vers l'Europe et l'international.
Quelle est la prochaine étape ?
Guillaume : un maximum de concerts, histoire de passer du bon temps entre nous, et avec notre public.
Question traditionnel de Music Waves, quel est votre meilleur souvenir d’artiste ?
Guillaume : mince, je suis obligé de le dire mais à titre personnel, la tournée avec The Old Dead Tree, avec mon frère en tant que batteur dans DustBowl.
Sinon je citerai aussi un concert avec ma toute première formation qui faisait des reprises de Metallica ; mais c'était il y a vraiment longtemps.
Au contraire le pire ?
Guillaume : pas vraiment de pire souvenir, je prends les choses comme elles viennent.
On a commencé cette interview par la question qu’on vous a trop souvent posée, au contraire, quelle est celle que vous souhaiteriez que je vous pose ?
Guillaume : J'en ai deux, une "un peu" réaliste, et l'autre pas du tout.
La "un peu" réaliste : "Allez-vous modifier votre set list pour la tournée européenne en première partie de Leprous ?"
La "pas du tout" réaliste : "Etes-vous satisfait du featuring de James Hetfield sur votre troisième album ?"
Le mot de la fin aux lecteurs de Music Waves ?
Guillaume : Merci à tous ceux qui porteront une oreille sur le dernier disque de Ommatidia.
Soyez assurés d'une chose, que la musique vous plaise ou non, vous écouterez des artistes qui font ça pour l'amour de l'art et rien d'autre.
Longue vie à Music Waves et à la musique progressive.
Et merci à Thibautk pour sa contribution...