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TITRE:

ELFIKA (10 JANVIER 2020)


TYPE:
INTERVIEWS
GENRE:

METAL MELODIQUE



Après une démo particulièrement bien accueillie par la presse et le public, Elfika revient avec son premier album. L'occasion pour nous de percer les secrets du groupe...
STRUCK - 19.02.2020 -
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Une longue interview lors de laquelle il sera question de tous les secrets entourant le projet Elfika à commencer par la comparaison inévitable avec Headline en raison des accointances entre le groupe et Didier Chesneau, le succès fulgurant de la démo et notamment à l'étranger et la vision du groupe du metal mélodique...



Quelle est la question qu’on vous a trop souvent posée et à laquelle vous auriez marre de répondre ?

Manu P : Aucune ! On répond à toutes les questions d’une manière générale…

Laure Ali-Khodja : Non en revanche ce qui m’énerve, c’est quand on se trompe sur mon nom…




On essaiera de ne pas le faire… Votre démo précédente avait été bien accueillie, comment avez-vous vécu cela ? Dans quelle mesure cela vous a aidé pour composer votre premier album ?

Manu : Je ne suis pas sûr que ça nous ait influencé tant que ça mais ça nous a surtout un peu surpris. La démo est une autoproduction et c’était un moyen pour tester l’accueil de notre musique. On n’avait vraiment pas de certitude sur ce qui allait se passer. Le gros élément déclencheur de la démo, c’est surtout que c’est elle qui a incité Valkyrie Rising -notre label actuel- à nous contacter.
Pour la composition, je serais tenté de te dire que c’étaient les bases de ce que nous voulions faire, les bases de notre musique -qui était limitée par le côté autoproduction- si bien qu’avec l’album, nous avons pu mettre tout ce qui nous avait manqué sur la démo.


A la suite de cette démo, et malgré l’accueil, cela n’a pas empêché que le line-up ait totalement été remanié.

Manu : Tout à fait !

Laure : C’est leur choix ! Ils sont partis d’eux-mêmes pour des raisons d’investissement personnel ou financier ; ils ne se sentaient pas de continuer avec nous tout simplement.


On a évoqué le bon accueil de la démo, le fait qu’un label vous contacte dès sa sortie… Comment expliquez-vous cela dans le metal symphonique, genre sur représenté par essence ?

Manu : Très honnêtement, on ne l’explique pas toujours pas. C’est une question que j’ai très souvent posée à ma correspondante de Valkyrie Rising. Valkyrie Rising est un label allemand et j’ai cru comprendre au travers des échanges que j’ai eu avec eux qu’ils n’avaient pas du tout la même vision de la musique que nous : ils avaient des retours de statistiques que nous n’avions pas. En fait, c’est passé par le principe qu’on a adhéré à la page Facebook FFMOE qui est gérée par Valkyrie. A un moment, ils ont dû avoir des statistiques de diffusion, des écoutes de morceaux qui sont sur la page. C’est la seule réponse que j’ai eue de Valkyrie quand je leur ai demandé pourquoi Elfika plus qu’un autre groupe : on m’a répondu assez laconiquement qu’ils avaient des statistiques !


C’est d’autant plus valorisant de la part d’un label allemand, pays où les groupes du genre dans lequel vous œuvrez sont légion…

Manu : Exactement !

Laure : C’est clair, nous n’expliquons pas. Certes, Manu fait énormément de boulot en termes de communication -sur les réseaux sociaux notamment- mais c’est vrai qu’encore aujourd’hui, on a dû mal à comprendre comment c’est arrivé…


Si on se réfère aux chiffres, la démo a été beaucoup mieux accueillie à l’étranger qu’en France !




N’avons-nous pas du mal à expliquer votre succès car notre vision franco-française n’est pas adaptée ? Et doit-on déjà en conclure que l’avenir d’Elfika est plus à l’international qu’en France ?

Manu : Si je dois m’en référer aux statistiques de streaming, d’écoutes, de ventes… de la démo, effectivement, 60 à 70% se fait à l’étranger.
Ne serait-ce que pour l’envoi des CDs : j’ai envoyé des CDs en France mais c’était surtout des proches mais la très grande majorité des CDs de la démo sont partis à l’étranger : j’en ai même envoyé au Japon, au Canada, en Amérique du Nord et du Sud !
Les statistiques de streaming sur Bandcamp montraient très clairement d’énormes pics d’écoute sur l’Europe du Nord, l’Europe de l’Est et même les autres continents.
L’accueil est sympathique en France mais effectivement si on se réfère aux chiffres, la démo a été beaucoup mieux accueillie à l’étranger qu’en France !


On pourrait dire que l’album est perfectible mais par rapport à notre objectif premier, nous sommes allés bien plus loin que tout ce que nous pouvions espérer faire
 

Votre actualité est la sortie de votre premier album “Secretum Secretorum”. Tu as évoqué les nouveaux moyens mis à votre disposition depuis que vous êtes signés mais malgré tout, est-ce que le résultat est conforme à ce que vous désiriez ?

Manu : De mon point de vue de compositeur, je serais tenté de dire que cet album est allé au-delà de ce que je voulais. Après, au sein du processus de création et de composition, on a été obligés avec Laure de se mettre dans un moule de fonctionnement qui était très au-delà de ce que nous avions l’habitude de faire.
Donc maintenant, on pourrait dire que l’album est perfectible mais par rapport à notre objectif premier, nous sommes allés bien plus loin que tout ce que nous pouvions espérer faire : les moyens étaient différents, les musiciens étaient différents… du coup, nous n’avons pas été limités dans nos objectifs et nous avons même pu aller au-delà.

Laure : En ce qui me concerne, je ne m’occupe pas de la composition, je suis plus dans l’interprétation… C’est vrai que le résultat est allé au-delà de nos espérances mais malgré tout, ça a été quand même dur pour nous deux. Je suis très fière de ce que nous avons fait, même si je ne suis pas totalement satisfaite de moi - c’est mon problème (Sourire) !


Nous avons été confrontés à des gens qui avaient une très grosse expérience de la musique et pas seulement du metal [...] ça nous a permis d’évoluer, de faire les ajustements nécessaires et d’obtenir cet album


Quand vous évoquez un résultat au-delà de vos espérances, faut-il y voir la patte de Didier Chesneau ?

Manu : Effectivement ! Didier a écouté les premières maquettes puisque nous travaillions ensemble en amont bien avant qu’il prenne en main la production et l’enregistrement.

Il avait écouté les maquettes et décelé un potentiel au niveau de la composition. Il y a mis son œil de producteur, d’ingénieur du son mais également de guitariste et du coup, l’album a évolué tout au long de la phase de composition, d’enregistrement et de post-production.
Il a donc effectivement la patte de Didier, il y a des choix qui ont été proposés et que nous avons validés avec Laure : rien de ce qui a évolué dans l’album ne s’est fait sans notre accord mais selon des consensus auxquels nous n’aurions pas forcément pensé.

Comme je te disais, nous avons été confrontés à des gens qui avaient une très grosse expérience de la musique et pas seulement du metal, que ce soit Didier qui a un gros passé dans la musique mais également le guitariste qui a œuvré sur toutes les guitares -Anthony Parker qui est un ancien de Fairyland- nous ne sommes pas face à des débutants (Sourire). Toutes ces personnes avaient une vision de la musique et une vision d’une manière de faire évoluer les choses que nous découvrions, ça nous a permis d’évoluer, de faire les ajustements nécessaires et d’obtenir cet album.


Et comment se font faites ces rencontres : de façon inopinée, ou est-ce le label qui vous a mis en contact ?

Manu : Ça fait longtemps que nous connaissions Didier. J’avais contacté Didier à l’origine quand je me posais la question de la production de la démo : autoproduction, home studio ou studio professionnel.

Laure : Au moment de mon arrivée dans le groupe en fait…

Manu : Oui, effectivement… Et à l’époque, Didier m’avait fait ce qu’il fait de mieux, il m’avait donné plein de conseils -nous étions même allés le voir dans son studio- à commencer par dire que pour une démo, l’autoproduction était suffisante pour tester le terrain. Du coup, avec Didier, le travail était largement amorcé en amont.
Pour Anthony, c’est différent. Quand nos guitaristes ont signifié leur décision de quitter le groupe, nous étions très proches de la phase où nous devions enregistrer. Nous étions face à un choix, soit on reportait l’enregistrement de l’album ce qui n’était pas forcément judicieux parce que Valkyrie attendait…


… c’est la raison du report de la sortie de cet album initialement prévue en septembre ?

Manu : En grande partie, oui ! Soit donc nous reportions l’enregistrement, soit nous faisions appel à Didier qui avait l’habitude de travailler avec des musiciens de session : il a l’habitude de ce genre de situation. Didier a accepté et nous a mis en contact avec un guitariste qui correspondait à notre style, qui avait la technicité… et c’est ainsi qu’Anthony est arrivé avec nous !


Est-ce que ce secret des secretS (“Secretum Secretorum”) fait référence au livre antique d'Aristote, à l'occultisme, ou est-ce cet album qui dévoile le secret des secrets ?

Manu : Il y a les deux versions. Effectivement, c’est une référence directe à Aristote, c’est un livre que j’ai souvent étudié et que j’aime beaucoup. “Secretum Secretorum” traite de plein de choses que ce soit de géopolitique, de manière de vivre que d’ésotérisme… domaines que j’essaie un peu de retranscrire dans l’album mais jamais de manière directe et frontale. La symbolique ésotérique, tout le monde s’en est servi, il y a d’autres manières de transposer les concepts philosophiques.
On a réfléchi à plein de titres, de possibilités pour cet album et je me suis dit qu’effectivement pour rester sur mon idée de base avec cette conception de secrets dévoilés, cachés, induits… ce n’était pas si mal. Et finalement, chaque morceau a sa petite part spéciale, des trucs qui sont évidents, d’autres qui le sont moins, des doubles, des triples lectures… chacun y trouve ce qu’il veut !


Au bout d’un moment, ne faire que du lyrique m’ennuie, c’est la raison pour laquelle j’aime bien faire des mélanges.




Les premières intonations du chant de Laure (‘So Human’) sont assez rock à la manière de Magali Luyten ou Floor Jansen, alors que le chant lyrique vient après, pourquoi avoir mis cet aspect très en avant ? Est-ce que c’est pour se démarquer des autres formations du genre ?

Laure : Pas forcément mais effectivement, on ne va pas se mentir, Floor Jansen a toujours été mon modèle depuis le début : je me base beaucoup sur After Forever… Mais après, j’ai commencé le chant dans le chant lyrique, je suis donc beaucoup plus à l’aise en lyrique bien évidemment mais au bout d’un moment, ne faire que du lyrique m’ennuie, c’est la raison pour laquelle j’aime bien faire des mélanges.
J’aimerais bien continuer ainsi et même aller un petit peu plus loin si possible en faisant de la voix saturée…


Je me suis toujours dit qu’il fallait que j’exploite ce potentiel vocal qui n’est pas que lyrique


Et qu’en pense ton voisin compositeur ?

Laure : (Rires)

Manu : C’est exactement ce que décrit Laure : je suis complétement d’accord ! Quand on a fait la démo, Laure était dans le groupe depuis très peu de temps. J’avais décelé son potentiel vocal mais la démo était particulière : elle arrivait sur des morceaux déjà écrits qui n’étaient pas adaptés à sa voix et elle s’en est très bien sortie. Depuis le début, je me suis toujours dit qu’il fallait que j’exploite ce potentiel vocal qui n’est pas que lyrique même si elle était un peu dubitative au début.
Je savais que j’avais entre les mains une chanteuse qui avait un potentiel énorme que je pouvais exploiter sur différentes tessitures et différents styles de chant. Et de toute manière, j’avais cette idée que le full lyrique dans le metal symphonique était déjà surexploité : on avait toutes les cartes en main, tous les éléments pour exploiter les capacités vocales de Laure et une approche différente de la musique.


On tient seulement à garder la mélodicité des morceaux, on veut que ça reste accessible et que les gens gardent quelque chose en tête !



Votre musique semble plus gothique comme Septic Flesh ou Chaostar que symphonique, est-ce que c’est ainsi que vous avez conçu l’album ?

Manu : Pas du tout ! Laure a des influences musicales symphoniques et moi, à la base, je suis un pur métalleux : mes références sont Iron Maiden, Metallica, Helloween… J’adore le symphonique depuis les années 2000 quand j’ai découvert Nightwish mais j’écoute du metal depuis que j’ai 5 ans.
Les influences qu’on va retrouver dans l’album, elles vont chercher un peu partout. Le processus est un peu hétéroclite quand on écrit les morceaux : Laure peut arriver avec une idée en tête et on se retrouve avec des morceaux qui sont par exemple du pur Amaranthe au niveau des rythmiques et de l’approche, d’autres morceaux ont une approche sur la basse et j’ai un style de jeu inspiré d’Iron Maiden et de Steve Harris.
On a été puisé un peu partout. En plus, Anthony est arrivé à la guitare : c’est un guitariste qui vient du prog et du power, c’est donc quelqu’un qui a des influences symphoniques et qui a une manière d’aborder la musique très différente et ça a rajouté une surcouche très metal, très prog bien que je l’aie un peu freiné dans ses élans… Du coup, des influences on pourrait t’en trouver des dizaines dans cet album.

Laure : En fait, je pense qu’on compose un petit peu sans vouloir donner un style directement, on compose en fonction de ce que nous ressentons sur le moment…

Manu : On tient seulement à garder la mélodicité des morceaux, on veut que ça reste accessible et que les gens gardent quelque chose en tête !


La composition en quatre parties [de 'Dark Virgin'], ça a été un peu mon chemin de croix




Pourquoi avoir découpé ‘Dark Virgin’ en quatre parties, alors que d’habitude le metal symphonique est assez carré, les chansons excédent rarement plus de 5 minutes ? Est-ce une marque de progressif et d’Anthony Parker ?

Manu : Pas du tout ! ‘Dark Virgin’ a été le morceau le plus compliqué à écrire de l’album…

Laure : … oui mais c’est toi qui as voulu le compliquer (Rires) !

Manu : Je le reconnais. A la base, c’est Laure qui a voulu intégrer dans l’album un ‘Avé Maria’. Je suis parti de cette idée, j’ai commencé à travailler sur un morceau qui serait dérivé de l’‘Avé Maria’, les idées ont fait leur chemin… mais il me fallait un concept, je ne pars pas sur un morceau si je n’ai pas de fil rouge. Puis je me suis dit ‘Avé Maria’, la Vierge, les Dark Virgins… j’ai une grosse culture ésotérique et on avait repris un titre qu’on a repris dans l’album qui venait de la démo ‘Inferno’ dans lequel on avait transposé la thématique d’‘Inferno’ sur les violences conjugales -le clip est déjà très explicite à ce niveau-là. Je me suis dit que ce ne serait pas idiot de faire une suite thématique et historique de l’histoire d’‘Inferno’. Ça s’est construit là-dessus…

La composition en quatre parties, ça a été un peu mon chemin de croix sans mauvais jeu de mots. J’ai dû effacer au moins une cinquantaine de fois le morceau de mon ordinateur avant d’arriver à ce que je voulais faire. Et finalement, je me suis dit que comme j’avais les idées, il ne fallait que je me limite et je devais foncer : ce titre est très clairement inspiré des pièces de Nightwish comme ‘Ghost Love Score’ ou ‘The Greatest Show On Earth’. Et pourquoi le découper en quatre parties ? Parce que tout simplement placer un titre de 13 minutes dans une tracklist, ça fait bizarre…


Et est-ce aussi pour ne pas effrayer l’amateur de metal symphonique habitué aux pistes plus courtes ?

Manu : Un petit peu… Il y a un peu de tout…
D’une part, dans une tracklist même si tu annonces un titre de 13 minutes mais que tu annonces que 8 ou 9 morceaux dans un album : ça fait bizarre ! C’est très technique et c’est Didier qui a mis le doigt dessus : les gens ne regardent pas forcément la durée !
Et deuxième, il y a quand même quatre thématiques à ‘Dark Virgin’ qui raconte une histoire à quatre volets : chaque partie a son histoire à raconter.


Et comment comptez-vous interpréter ce titre sur scène, dans son intégralité ?

Manu : Pour le moment, nous n’avons pas encore intégré ce morceau au set live parce que les durées du set ne nous le permettent pas. On va dire que c’est un morceau d’ajustement sur les sets longs. On a la possibilité de réduire certaines parties…

Laure : … mais le but est de le garder dans son intégralité.


Tu as évoqué la thématique de la violence conjugale développée au sein de ‘Dark Virgin’ faut-il aborder “Secretum Secretorum” comme un concept album ?

Manu : Ce n’est pas la même thématique déclinée sur tout l’album. Si on reprend le fil rouge de “Secretum Secretorum”, c’est un livre, du moins sept livres d’Aristote qui traitent de plein de choses et l’album fait un peu la même chose. ‘Dark Virgin’ est une thématique héritée d’‘Inferno’ qu’on a reconstruite et redéveloppée mais c’est le seul morceau qui traite de cela. Les autres morceaux ont des thématiques qui leur sont propres, qui parlent et dénoncent d’autres choses mais toujours dans cette idée d’avoir une espèce d’ensemble aussi homogène que possible mais avec plein d’idées…


Les influences sont donc bien présentes mais je n’ai pas du tout la prétention de copier ou reproduire Nightwish […] On ne refait pas Nightwish sinon on aurait fait des covers


Tu as cité l’influence de Nightwish notamment sur le titre ‘Dark Virgin’, vos influences sont Kamelot, Nightwish, Epica et c’est clairement revendiqué. N’est-ce pas dangereux de devoir être comparé à des groupes aussi cultes et des pointures, car les auditeurs vont s’attendre à du Nightwish (bis) ou du Kamelot (bis) ce qui n’est clairement pas le cas ?

Manu : Ce n’est pas le cas et c’est bien pourquoi nous parlons d’influences. Quand je décris les influences du groupe, j’essaie de montrer qu’elles sont multiples et de tous les côtés. S’il est honnête, n’importe quel compositeur te le dira qu’il ne peut pas écrire de musique venant de rien, c’est forcément sa culture musicale, sa technicité qui l’influencent quand il écrit. Je serais donc bien présomptueux de dire que je n’ai pas été influencé par ce que j’écoute. Les influences sont donc bien présentes mais je n’ai pas du tout la prétention de copier ou reproduire Nightwish… de toute façon, ils sont intouchables… On ne refait pas Nightwish sinon on aurait fait des covers ce qui n’est pas notre objectif.


Votre album oscille entre passages rapides (‘Angel’) et passages mélancoliques, romantiques plus lents (‘The Other’), est-ce que cette variété est votre identité, comme chez Visions of Atlantis ?

Manu : Je ne sais pas si c’est une identité propre, c’est surtout comme disait Laure tout à l’heure que ça a été amené par le processus de composition.

Laure : Chaque musicien a ses propres influences et du coup, c’est compliqué de se comparer à un autre groupe…

Manu : Si j’adore Visions of Atlantis, je n’ai pas du tout cherché à le copier… Mais tes parallèles sont intéressants parce que ça montre qu’il y a des reconnaissances de l’extérieur auxquelles nous n’avions pas pensé.
Tu citais ‘The Other’ dont la manière dont il a été construit n’a pas du tout été inspiré par un groupe mais par la thématique : c’est un morceau que j’ai écrit qui est extrêmement personnel qui traite de choses très personnelles et je l’ai construit en fonction de mon ressenti, des sentiments que j’ai et que je voulais faire passer. Ce titre a donc été construit dans cette idée-là avant même de penser à autre chose. Après, je ne vais pas te dire que dans la façon dont je l’ai fait évoluer, il n’y a pas eu des idées qui me sont venues parce que j’adore tel ou tel passage de tel ou tel groupe que je ne donnerai pas mais il y en a (Sourire)…


Mon propre album me fait frissonner dans la manière dont les morceaux rendent




Votre album est très varié, très metal, mais toujours très doux, très mélodique et très agréable à écouter, est-ce que vous en avez conscience ? Comment avez-vous réussi à obtenir cette douceur, est-ce que c’est simplement la douce voix de Laure ?

Laure : Honnêtement, je ne sais pas du tout parce que j’ai écouté les chansons tellement de fois qu’au bout d’un moment, je suis complétement perdue. Aujourd’hui, j’ai juste hâte d’avoir un retour du public extérieur.

Manu : C’est vrai que ça fait des années qu’on écoute nos morceaux et qu’on les voit évoluer… On les a écoutés des milliers de fois et on a du mal à voir comment les gens les perçoivent, c’est la raison pour laquelle l’avis extérieur est important. Mais d’un autre côté, Laure me faisait la réflexion l’autre jour, j’arrive encore à écouter mon album dans ma voiture…

Laure : De mon côté, je n’y arrive plus (Rires) !

Manu : Pourquoi continue-je à écouter cet album ? Pour deux raisons. D’une part, ça me permet d’apprendre mes morceaux sur le bout des doigts et de les avoir toujours en tête et d’autre part et sans excès d’orgueil, il y a encore des moments où mon propre album me fait frissonner dans la manière dont les morceaux rendent : je ne m’attendais pas à ce qu’ils rendent ainsi !
Maintenant, nous sommes assez mal placés pour juger le côté douceur que tu décris…


Justement quand vous écoutez votre album, n’avez-vous pas tendance à entrer dans l’autocritique ?

Manu : Bien sûr !

Laure : Aujourd’hui, quand on écoute l’album, on ne voit que les défauts et on n’arrive plus à voir la chose positive du morceau ou de l’album en général.

Manu : C’est de l’autocritique technique. On sait que ce qu’on a fait et ce qu’on n’a pas eu le temps de faire parce que malgré tout, on n’a pas pu faire tout ce qu’on voulait mais au bout d’un moment, le studio, ça s’arrête et il faut savoir passer à autre chose.
Donc effectivement, c’est de l’autocritique mais très technique…


On aime ce qu’on a fait -on en est fier même très fier- mais on sait qu’on peut mieux faire et on sait qu’on fera mieux


Et n’est-ce pas néfaste ? C’est-à-dire le risque de rentrer dans un cercle vicieux ?

Manu : Je suis bien d’accord : il y a une ligne rouge à ne pas franchir. Il faut toujours rester satisfait de ce qu’on fait mais jusqu’à une certaine limite. La ligne rouge est à double tranchant : soit on est trop satisfait et ce n’est pas bon parce que l’autosatisfaction à outrance ne mène à rien, soit on n’est pas du tout satisfait et ce n’est pas bon non plus parce qu’il faut le jouer, cet album…
On essaie de garder cet équilibre en disant qu’on aime ce qu’on a fait -on en est fier même très fier- mais on sait qu’on peut mieux faire et on sait qu’on fera mieux (Sourire)…

Laure : Mine de rien, nous sommes très contents du résultat parce que quand on est arrivés au studio, honnêtement, on ne pensait pas qu’on arriverait à un niveau pareil… mais maintenant que nous sommes arrivés à ce stade, nous voyons tous les petits détails qui ne vont pas…


L’aspect symphonique fait partie intégrante de votre musique malgré tout et n’est pas un simple habillage -des passages symphoniques travaillées, des envolées lyriques…-, est-ce que cela traduit votre amour pour la musique classique et une culture classique ? Qui est le maître d’œuvre de ses parties symphoniques ?

Manu : Les parties symphoniques traduisent mon amour pour la musique classique. J’ai une formation classique à la base au Conservatoire et d’organiste -d’église et pas l’orgue Hammond- et j’ai aussi une formation en conduite d’orchestre… tout cela un peu loin du metal mais ça se complète bien ! J’ai toujours adoré la musique classique symphonique et lyrique, l’opéra… mes références sont Wagner, Strauss, Bach, Beethoven, Mozart dans certains opéras…


J’ai fait une partie de ma thèse sur les possibilités d’associer les techniques de heavy metal avec celles du symphonique, ce qui avait été très mal perçu à l’époque d’ailleurs






… et tu as cité Wagner en premier qui n’est pas le plus doux et on peut faire le lien avec le metal…

Manu : C’est extrêmement puissant, la ‘Chevauchée des Walkyries’ est un morceau qui me fait frissonner comme ce n’est pas autorisé. Et je pourrais t’en citer des dizaines : la symphonie ‘Du Nouveau Monde’ de Dvořák est juste une merveille…

Ce côté symphonique vient de mon amour pour ces grandes orchestrations. C’est quelque chose que j’ai toujours adoré dans les groupes comme Nightwish, les groupes qui utilisent le symphonique : c’est cette puissance qu’on peut dégager entre le symphonique et le metal. Quand j’étais au Conservatoire, j’ai fait une partie de ma thèse sur les possibilités d’associer les techniques de heavy metal avec celles du symphonique,ce qui avait été très mal perçu à l’époque d’ailleurs… mais je n’ai pas loupé mon diplôme, quelque part, on peut penser que j’ai réussi à faire passer le message (Sourire) !

Il y a ce côté amour du classique et la certitude que le symphonique bien utilisé peut sublimer le côté mélodique et puissant des morceaux.
C’est donc moi qui compose les orchestrations. Pour l’album, j’ai fait appel à un arrangeur qui s’appelle Dark Fantasy Studio parce que je voulais un regard différent sur mes orchestrations. J’ai pris un orchestrateur que j’avais vu à l’œuvre sur d’autres albums que j’avais écouté et on a travaillé ainsi… Je ne sais pas si je referai ainsi la prochaine fois mais en attendant, c’est l’approche que j’ai eu pour cet album.

Laure : Et entretemps, on a recruté un claviériste…

Manu : On a maintenant un claviériste et effectivement, les choses se feront différemment…


On a beaucoup évoqué Didier Chesneau par ailleurs et son apport. Est-ce sa présence qui fait que votre musique peut rappeler dans la démarche d’Headline ? Sachant que le groupe a débuté par du metal symphonique pour se diriger vers du metal progressif, est-ce que vous êtes les nouveaux Headline ?

Manu : Honnêtement, je ne sais pas si Didier apprécierait bien si je disais oui (Rires) !


Succéder à Headline quand on sait que le côté prog a été excessivement développé, ce n’est pas mon objectif ! Pour avoir eu la chance d’écouter ce que fait Attraction Theory actuellement, je pense qu’ils sont bien placés pour le faire.



Ça restera entre nous, il ne nous lira pas…

Laure : Houla, n’en sois pas si sûr (Rires) !

Manu : Honnêtement, j’ai écouté la quasi-totalité de la discographie d’Headline grâce à Didier d’ailleurs qui a eu la gentillesse de me la fournir (Sourire). Le côté prog d’Headline a été très rapidement mis en œuvre. Succéder à Headline quand on sait que le côté prog a été excessivement développé, ce n’est pas mon objectif ! Pour avoir eu la chance d’écouter ce que fait Attraction Theory actuellement, je pense qu’ils sont bien placés pour le faire.
Je pense que nous développons notre style mais je serais incapable de te définir vraiment quoi -comme tu le sais et comme tu l’as dit, il y a plein d’influences…- et je n’essaie surtout pas de me mettre en position de succéder ou concurrencer qui que ce soit !


Ce soir, vous allez jouer avec Attraction Theory justement qui ont participé à votre album. Est-ce que ce concert est une réunion de famille, ou des retrouvailles de postes ?

Laure : Je vois ça comme un concert entre potes.


En espérant qu’il n’y ait pas que des potes en raison des grèves…

Manu : C’est le gros risque, on en est conscients. Comme nous l’avons annoncé, nous sommes conscients des difficultés liées au contexte actuel si bien qu’il y ait 10, 20, 30, 50 ou 100 personnes… on jouera de la même manière : ça ne changera rien ! Au contraire, ceux qui seront là et qui auront fait l’effort de venir : on va encore plus décupler notre plaisir à jouer pour eux !
L’idée du concert avec Attraction Theory, c’est qu’au fil du travail qu’on a fourni avec Didier, on a quand même noué un certain lien d’amitié avec lui…

Laure : Didier et Constance sont devenus des amis.

Manu : Constance qui a notamment aidé Laure sur les parties backing vocals qu’elles ont faites à deux. Ce sont devenus des amis et l’idée de faire tourner Elfika et Attraction Theory, ça nous a paru intéressant parce que ce sont deux styles complémentaires, deux groupes qui s’entendent très bien -je connais également très bien leur bassiste Christophe Babin avec qui je m’entends très bien… On a partagé beaucoup de choses ensemble : on a enregistré un album, on est devenu des amis, pourquoi pas ne pas faire une release ensemble…


Un album comme celui-ci : c’est du temps, de l’argent donc forcément derrière, on aimerait quand même que l’album se diffuse un maximum !





Quelles sont vos attentes pour cet album ?

Laure : Qu’il soit bien accueilli (Sourire) !

Manu : Il y a les attentes d’accueil, ce serait faux de dire qu’on n’a pas d’attentes commerciales… Un album comme celui-ci : c’est du temps, de l’argent donc forcément derrière, on aimerait quand même que l’album se diffuse un maximum !
Mais ce que nous attendons également c’est de voir comment les gens vont le recevoir : ça va nous donner de très bons indicateurs pour la suite. Avons-nous pris une bonne direction ? Parce que malgré tout quand on compare la démo et l’album, c’est très différent ! Et même les morceaux qui ont été repris depuis la démo ont été largement retravaillés et pas seulement au niveau des orchestrations. Quand on parle de retravailler, on parle des lignes rythmiques, les lignes harmoniques et même certaines lignes d’accord et on ne s’est pas contentés de rajouter trois lignes de violons en plus… On a fait beaucoup de choix, on a pris des risques et on attend de savoir comment les gens vont accueillir tout ça.

Laure : Ça va nous aider à nous aiguiller sur les prochaines compositions : savoir quelles sont les chansons les plus écoutées…


On a commencé cette interview par la question qu’on vous a trop souvent posée, au contraire quelle est celle que vous souhaiteriez que je vous pose ou à laquelle vous rêveriez de répondre ?

Manu : C’est une belle colle ! Tu marques un point (Rires) !


Généralement, les personnes interviewées butent sur cette question, ce que je vous propose c’est d’y réfléchir et nous commencerons la prochaine interview par cette question…

Manu : Avec plaisir !


Malgré tout, j’ai une question subsidiaire pour toi Laure. Entre la démo et cet album, tu as changé de couleur de cheveux passant du brun au blond, faut-il s’attendre à une coloration rousse pour le prochain album ?


Laure : (Rires) Non mais en revanche, on m’a fait la réflexion en me demandant si j’étais la nouvelle chanteuse (Rires) !
Non, je ne sais pas, j’avais envie du blond à ce moment-là : je me suis teinte en blonde ! Et là, je pars plus, j’aimerais bien avoir les cheveux violets par exemple… mais peut-être faire plus de rajouts mais je ne sais pas encore…


Tout le monde voudrait comparer à Elize Ryd, Simone Simons ou à Floor Jansen sur leur manière d’être mais ce sont trois chanteuses différentes, trois physiques différents… je pense que de ce côté-là, Laure a vraiment trouvé son image, son look, son style…


Et toi ?

Manu : Et bien moi, ça tend vers le gris et ça restera comme ça.
Mais ce qui est intéressant derrière le côté humoristique de la couleur de cheveux de Laure, c’est l’image qu’on renvoie avec notre chanteuse. Nous sommes en pleine discussion parfois assez véhémente sur le concept de groupes à chanteuse, frontwomen… au sein du groupe, avec Laure, on a toujours fait en sorte qu’elle ait l’image qu’elle voulait avoir et non pas celle qu’on attendait d’un groupe.
Comme je lui ai toujours dit qu’il fallait qu’elle trouve son style, là où elle se sent à l’aise, là où elle pense pouvoir délivrer le message Elfika et pas le message qu’on attend par rapport à toutes les autres frontwomen : tout le monde voudrait comparer à Elize Ryd, Simone Simons ou à Floor Jansen sur leur manière d’être mais ce sont trois chanteuses différentes, trois physiques différents… je pense que de ce côté-là, Laure a vraiment trouvé son image, son look, son style…

Laure : Je ne sais pas, je trouve que je me cherche encore un peu (Rires)…

Manu : Je pense qu’on s’est bien posé dans un style qui est cohérent avec l’idée du groupe : on a une chanteuse, on profite de son talent mais dans une certaine ligne de conduite où c’est son talent avant tout !

Laure : En tous cas, une chose est sûre : j’aime bien les pantalons (Rires) !





Merci

Elfika : Merci à toi !


Meric à ThibautK pour sa contribution...


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ELFIKA: Secretum Secretorum (2020)
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“Secretum Secretorum” est un album énergique et mélodique plein de sensualité, au symphonisme discret et à l'énergie rock intense.
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