Au détour d'une riche et passionnante interview avec Antoine alias A.M. -guitariste rythmique du groupe- et Thomas alias T.C. -chanteur-, nous avons pu faire une vaste tour d'horizon de la carrière de Regarde les Hommes Tomber. Au début, projet solo et introspectif de JJS, le groupe a peu à peu muté en l'incroyable collectif qui a su créer sa propre identité sonore gré de trois albums dont "Ascension" représente la quintessence d'un black metal plus extrême et radical et paradoxalement plus accessible avec l'intégration d'ambiances atmosphériques... Interview à part d'un groupe à part qui vous expose sa vision à part du black...
Quelle est la question qu’on vous a trop souvent posée à laquelle vous auriez marre de répondre ?
Antoine alias A.M. : C’est de présenter le groupe (Sourire) !
[Cet album] était vraiment compliqué parce que nous avons changé notre façon de fonctionner !
Plus de quatre années se sont écoulées depuis votre deuxième album "Exile" qui lui-même avait été difficile à accoucher. Faut-il penser que la réalisation de "Ascension" a été encore plus ardue ?
Thomas alias T.C. : Ça a été encore plus dur !
Antoine : En fait, nous sommes un groupe assez transparent sur notre manière de fonctionner -peut-être trop ? je ne sais pas- mais je pense que toute musique extrême est déjà cathartique et le processus de cet album particulièrement… Cet album a été un exutoire pour nous.
Nous avons mis du temps avant de nous y mettre : nous avons pris le temps de faire les concerts dans un premier temps, faire une pause de quasiment un an -nous avions besoin de disparaître un petit peu- et au moment d’attaquer le processus de composition, nous nous demandions si nous étions capables de faire un album.
Mais c’était vraiment compliqué parce que nous avons changé notre façon de fonctionner, cette fois-ci, j’ai beaucoup plus écrit alors que normalement c’est notre guitariste, JJS. Il a fallu accorder nos violons sur ce point. Nous sommes un groupe qui travaille beaucoup en studio de répétition alors que dans la majorité des groupes aujourd’hui, chacun bosse chez soi…
Thomas : Et ça n’a pas été simple parce que nous sortions d’une phase de deux ans où nous avions énormément tourné : nous avions nos habitudes de groupe en tournée qui ne répétait quasiment plus. Et donc revenir en local de répétition pour composer du matériel neuf et opérer un consensus entre tous les membres du groupe, ce n’est jamais simple.
Antoine : Pour être plus précis, ce n’est pas le fait de composer pour Regarde les Hommes Tomber qui est dur mais plutôt réussir à travailler ensemble. Mais ce n’est pas une contrainte non plus. On aime travailler ensemble, on aime composer des morceaux : j’avais accumulé plein d’idées, pleins de riffs et c’était le cas de chacun d’entre nous. Et ce qui était compliqué, c’est de réussir la matière finale.
L’important est de faire quelque chose qui nous rassemble par rapport à
notre concept ce qui fait que ça nous laisse de la place dans la
composition.
D’autant plus compliqué que comme vous le dîtes, pour cet album, vous avez changé votre mode de fonctionnement à savoir qu’initialement, la composition était réservée à JJS… pour une écriture plus collective où la difficulté réside dans le fait de trouver un consensus…
Antoine : Totalement ! La première flamme de composition est individuelle et effectivement, avant, c’était réservé à JJS. Sur "Exile", notre batteur avait composé entièrement un morceau et j’avais commencé également à m’y mettre. Entretemps et pour cet album, j’ai accumulé plein de riffs et nous avons fait une mise en commun de toutes ces idées.
Ce qui est intéressant avec Regarde les Hommes Tomber, c’est que ce n’est pas un groupe enfermé dans un truc spécifique, notre concept est assez large et ça nous offre un grand espace de liberté : c’est la super chance que l’on a ! L’important est de faire quelque chose qui nous rassemble par rapport à notre concept ce qui fait que ça nous laisse de la place dans la composition. Et changer de mode de fonctionnement nous permet également de ne pas trop nous répéter, ce qui est le piège de tous les groupes.
Vous avez dit que JJS était le principal compositeur, que le batteur, toi-même Antoine participaient à l’écriture mais toi (Thomas), tu fais quoi dans l’histoire ?
Thomas : (Rires) On va dire que j’ai un rôle d’interprète finalement parce que ce n’est même pas moi qui écris les textes. Nous avons un parolier qui s’appelle Henoc qui est passionné d’histoires bibliques. Pour le coup, il a fait une création à partir du prisme judéo-chrétien de toute la mythologie et toujours par rapport au concept du groupe.
Cet album s’inscrit dans une trilogie et mon rôle est surtout de faire passer de l’émotion dans ces textes.
Et n’est-ce pas frustrant ?
Thomas : Non, pas du tout, bien au contraire. Je préfère cela, ça me permet de me concentrer sur ce que je sais faire et je pense que je le fais bien.
Antoine : Pour faire un parallèle que je trouve intéressant, comme il y a une dimension un peu prophétique dans notre musique et dans les paroles, Thomas est un peu le prophète qui reçoit les révélations. Et en particulier sur cet album, il a un chant assez halluciné.
On évoquait un consensus à trouver au niveau de la composition de la musique mais comment ça se passe pour les textes : échangez-vous comme pour la musique ou prenez-vous ces textes comme une prophétie justement ?
Antoine : Il y a un peu des deux.
Thomas : Nous voulions qu’il y ait une cohérence par rapport aux deux sorties précédentes. Après, Henoc a été assez libre dans son "délire" : il a été vraiment démiurge par rapport à ce qu’il a créé. Autant les deux premiers étaient d’inspiration mythologique, autant pour cet album, il s’est servi des mythes pour créer un truc à part entière.
Antoine : Un truc qui correspond à ce que nous voulions faire. Et ce qui est intéressant c’est qu’en fonction des individualités, nous avons tous une interprétation différente de chaque chose, que ce soit les paroles de Henoc, notre manière d’interpréter, les visuels qui sont très importants pour nous -des pochettes d’album qui racontent des histoires-, les symboles qui sont également très importants…
Après deux premiers album sortis chez Les Acteurs de l’Ombre, vous avez rejoint Season of Mist. Pourquoi un tel choix, vous avez désormais des ambitions internationales ?
Antoine : Exactement ! On a eu une très bonne collaboration avec Les Acteurs de l’Ombre et nous avons reçu une super proposition de Season of Mist qui nous prenait au sérieux et ça faisait très plaisir…
L’idée est de ne pas se répéter et de faire des choses qu’on n’a jamais faites.
Ce n’est pas le cas des autres labels ?
Antoine : Ce que je veux dire c’est qu’il ne faut pas se leurrer : l’industrie musicale est un milieu compliqué et finalement, tu as plein de gros labels qui signent des groupes très facilement en espérant que ça marche derrière mais qui ne les travaillent pas. Tout le monde le sait !
Nous avons senti qu’il y avait une prise de considération par rapport à ce qu’on voulait faire et c’est ce qui a fait pencher leur offre dans la balance. En plus, c’est un label français, c’est donc plus facile pour travailler. Ce que nous voulons, c’est un label international qui nous permet de nous développer. L’idée est de ne pas se répéter et de faire des choses qu’on n’a jamais faites.
Sur le premier album, votre style ne paraissait pas encore bien défini. "Exile" a témoigné d’un recentrage vers une identité plus black metal ce que "Ascension" confirme et amplifie. Etait-ce le but recherché ?
Thomas : De façon indirecte, oui ! Dans notre manière de composer, on n’essaie pas de se conformer à tel ou tel style ou mode : on fait la musique qu’on aime. Ce sont nos influences mais on n’a pas forcément calculé ça. Mais c’est vrai que "Ascension" est plus extrême, plus radical.
Antoine : Le black metal n’est que le vecteur de ce que nous voulons faire. Quand j’ai intégré le groupe, il y avait une patte black metal, mais ce que je trouvais super intéressant c’est que JJS avait composé des morceaux très introspectifs. A la base, Regarde les Hommes Tomber était son projet personnel et il ne pensait pas forcément faire un groupe collectif.
En gros, on s’est inspirés mutuellement avec un esprit très sombre et forcément, au fur et à mesure, tu dérives vers du black metal ce qui est blasphématoire par rapport à la scène. Mais ce n’est pas dur de faire du black metal, nous y sommes venus progressivement et naturellement : je pense que c’est le mieux de le faire ainsi parce que notre démarche est sincère !
Et puis, c’est également la musique que j’écoute le plus et donc quand je compose, les influences vont revenir…
Le black metal est sans compromission. Ce côté sans compromission, nous
l’avons dans notre manière de composer!
Et dans tout ça, que pensez-vous de l’étiquette post black qui vous est accolée ?
Antoine : Ça me fait chier ! Je sais que les gens aiment mettre des étiquettes, moi-même je l’ai fait quand j’étais ado. Mais ce n’est pas possible avec Regarde les Hommes Tomber. Je dirais qu’on fait du black metal avec un côté doom pour les passages lents.
Malheureusement pour certains, nous ne sommes plus dans l’esprit des années 1990, le black metal est un style extrêmement large et personnellement, je trouve ça génial !
Pour revenir au terme post black metal, c’est que j’ai le sentiment qu’on parle de black metal édulcoré, un black metal gentillet, pour tout le monde… alors que non, le black metal est sans compromission. Ce côté sans compromission, nous l’avons dans notre manière de composer : nous ne composons pas pour plaire à tel ou tel public, nous faisons une musique pour nous !
Thomas : C’est déjà assez galère pour que ça nous plaise à nous tous dans le groupe si en plus, il faut plaire à un public, on n’est pas dans la merde (Rires)…
Assez bizarrement, ["Ascension"] est un album plus extrême et radical que les précédents mais aussi plus accessible !
Plus encore que ses devanciers, "Ascension" est le parfait équilibre entre ce black metal que vous évoquez et le côté atmosphérique, post-metal voire sludge… et peut-être même créer une identité propre…
Thomas : Merci !
Antoine : C’est très intéressant parce que tu es la deuxième personne à nous le dire. C’est quelque chose que nous n’avions pas du tout anticipé.
Thomas : Assez bizarrement, c’est un album plus extrême et radical que les précédents mais aussi plus accessible ! Après, ce ne sont pas des formats pop bien évidemment, ça reste de longs morceaux très narratifs. Paradoxalement, je trouve qu’il y a une facilité d’accès sur ces morceaux plus présente que sur les précédents albums.
Antoine : Le fait est que nous avons composé des morceaux qui sont longs, intenses et épiques mais nous avons essayé de garder quelque chose de catchy.
Pour autant, "Ascension" est une œuvre musicalement très noire et torturée. Est-ce que cela correspond à ce que vous vouliez exprimer ?
Antoine : Comme je le disais tout à l’heure, cet album est un exutoire. Personnellement, j’ai perdu ma mère qui a été extrêmement malade pendant le processus de composition, je changeais de vie… c’était une période hyper dure et en plus, l’album a représenté énormément de boulot. Nous allions en répétition pour nous défoncer la gueule, on voulait se faire mal…
J’ai vu un groupe de black metal dire que le black metal ne se devait
pas d’être un exutoire mais la propagande de Satan [...] Ce sont des
conneries : tu fais de la musique extrême parce que tu as un malaise à
exprimer !
… le côté cathartique…
Antoine : Absolument ! Et récemment, j’ai vu un groupe de black metal dire que le black metal ne se devait pas d’être un exutoire mais la propagande de Satan : ça m’a fait mourir de rire ! Ce sont des mecs qui s’inventent des trucs. Ce sont des conneries : tu fais de la musique extrême parce que tu as un malaise à exprimer !
Et pour rebondir, tu peux être torturé mais avec une volonté d’aller vers la lumière et le feu de la pochette de "Ascension", c’est une espèce de feu intérieur pour aller vers quelque chose d’autre.
Dans Regarde les Hommes Tomber, il y a toujours une figure divine, démiurge extrêmement négative. J’aime beaucoup l’esprit agnostique des chrétiens qui vont considérer que Dieu est un démiurge et que la vérité est cachée à travers l’humanité et c’est un peu l’idée du groupe.
J’en ai marre des groupes qui disent que la vie est horrible etc… j’estime qu’on délivre un message plus positif mais aussi tragique parce que l’album s’appelle "Ascension" mais finit par sur la phrase 'Regarde les Hommes Tomber' et clôt ainsi le cycle des trois albums.
Bien que longs, vos titres conservent, plus que jamais d’ailleurs, une grande fluidité dans la progression. Comment vos compositions se mettent-elles en place ? Y-a-t-il un squelette à la base auquel se greffent par la suite les idées de chacun ?
Antoine : C’est exactement ça : un squelette de départ sur lequel se greffent les idées de chacun. Sachant que c’est compliqué pour Thomas parce que le chant arrive à la fin et pour lui, c’est galère parce qu’il faut qu’il attende les versions finales.
Thomas : C’était extrêmement frustrant d’attendre de longs mois pour caler le chant mais il fallait que j’aie les versions définitives des morceaux, c’était le deal…
Antoine : C’est ainsi qu’on travaille. Il y a une idée première, le premier morceau ‘New Order’ qui définit la marche à suivre pour le reste de l’album. Ce titre est également un peu la réponse à ‘The Incandescent March’ qui clôturait "Exile".
Thomas : C’est la suite…
Antoine : … et les paroles sont la suite directe. La fierté que j’ai eu sur cet album, c’est que nous avons mélangé différentes influences. On verra si les gens le noteront mais je me suis amusé à faire référence différents groupes et personne ne le fait !
On ne va pas trop s’avancer mais on va partir du principe que tout est possible.
On en parle depuis le début "Ascension" clôt une trilogie entamée avec l’album éponyme mais savez-vous dans quelle direction Regarde les Hommes Tomber ira maintenant que cette trilogie est achevée ? Avez-vous envie d’explorer d’autres univers ? Vous nous avez indiqué avoir travaillé différemment sur cet album, maintenant que la trilogie est close et que vous n’êtes plus contraint à une ligne directrice, pourrait-on envisager que toi, Thomas, tu participes à l’écriture des textes ?
Thomas : On ne va pas trop s’avancer mais on va partir du principe que tout est possible. C’est-à-dire qu’avec cet album, on clôt un triptyque, notre priorité immédiate est de tourner. Mais pour la suite, on n’en sait absolument rien !
Antoine : Tout est ouvert ! Mais c’est assez compliqué parce que non seulement, il y a la musique mais également le concept. Par exemple, nous avons de nouveau collaboré avec les artistes de Førtifem pour la pochette de l’album et donc, nous restons encore dans notre univers.
Si tu veux, nous avons composé cet album de façon un peu cadrée, nous avons signé avec Season of Mist pour des albums mais nous aimerions bien faire un EP, un truc vraiment différent… Dans cette optique, nous avons fait une collaboration avec les Parisiens de Hangman’s Chair et c’était cool parce que nous avons abordé notre musique de manière différente, on a revisité nos morceaux avec eux avec une patte plus doom en changeant l’accordage…
On voudrait faire un morceau de 20 minutes, on voudrait… peut-être le fera-t-on ? Peut-être ? Sachant que c’est un risque. Si je pense à Darkthrone dans le black metal, il y avait toujours un univers dans leurs premiers albums -c’était toujours la même pochette- et à partir du moment où ils ont changé, tout le monde a été déçu alors qu’ils ne voulaient que s’émanciper un peu de ce qu’ils avaient fait au départ.
De la même façon, j’étais un grand fan de Mastodon quand j’étais jeune mais à partir du moment où ils ont modifié leur visuel d’album, j’ai été déçu…
C’est compliqué parce que tu peux toujours décevoir…
En revanche, si vous ne le faites pas, le risque est de tourner en rond et vous décevrez de toute façon…
Thomas : Exactement ! C’est la raison pour laquelle je suis assez admiratif de ces groupes qui assument un changement de cap esthétique que ce soit musicalement ou visuellement. Je pense notamment à Darkthrone, Opeth… Je suis un grand fan de "Blackwater Park"…
… jusqu’à chercher à ressembler à Mikael Akerfeldt ?
Thomas : C’est vrai, je lui ressemble ? Je ne le savais pas (Rires) ! Non pas spécialement : je suis fan mais pas à ce point !
Du coup, je suis assez admiratif de tous ces groupes qui essaient de s’extirper de leur base pour grandir finalement, quitte à déplaire leur public de base ! Malgré tout, en ce qui nous concerne, ce ne sont pas forcément des questions qu’on se pose dans l’immédiat !
Antoine : Et puis le processus de création est hyper instinctif…
Et pour en revenir à la suite justement, maintenant que vous avez clos une trilogie, est-ce que le processus de création sera plus compliqué ou aisé ?
Antoine : Pour ma part, c’était la première fois que je composais pour un groupe de musique donc je suis un peu neuf dans la composition : j’ai plein de choses à dire !
JJS a 10 ans de plus que moi. Il a jeté les bases de la composition du groupe et si tu veux, au bout d’un moment, c’était un peu compliqué parce qu’il nous proposait des choses qui ressemblaient un peu à ce que nous faisions au départ. J’ai donc apporté un peu de sang neuf dans les compositions à ce niveau-là.
On parle beaucoup de JJS qui a créé Regarde les Hommes Tomber et le fait que le processus de création est désormais un travail plus collectif. Etait-ce une demande de sa part ou des autres membres du groupe qui voulaient faire évoluer le groupe ?
Thomas : Ça s’est fait assez naturellement mais ça n’a pas été évident pour autant. Tout ce process a été hyper dur !
Antoine : Même si on ne veut pas dévoiler tout l’envers du décor, ça a été dur pour lui forcément…
… Bien évidemment, c’est son bébé !
Antoine : Exactement ! Mais ce qui est génial, dans le cas des compositions auxquelles j’ai contribué, j’ai jeté les bases. Par exemple, tous les riffs que j’ai composé sur une guitare électrique sans être branché… c’était de manière très brute, sans effet… et je composais pour une guitare ce qui fait que JJS avait toute la liberté pour faire ce qu’il voulait dessus. De la même façon, je ne composais pas la batterie… j’ai juste amené une mise en commun ! C’était très intéressant alors qu’au début, quand il composait des morceaux, il faisait tout.
Le mode de fonctionnement de ce nouvel album est très intéressant mais c’est plus dur, plus harassant parce que ça demande de l’implication alors que quand quelqu’un t’envoie une pré-prod où tout était déjà fait…
On l’a dit, vous êtes désormais signés sur Season of Mist pour cet album. Avez-vous ressenti plus de pression au moment de vous lancer dans l’élaboration de ce troisième album ?
Antoine : La première pression qu’on s’est mise, c’est la nôtre avec l’idée qui était : allons-nous réussir à faire un album ?
Il y a une pause et à un moment, le groupe a voulu se remettre à composer, sauf que je n’étais pas à Nantes -j’étais encore à Paris. Je retardais un peu la composition parce que je voulais absolument y participer.
On a mis du temps pour savoir sur quelles bases on allait partir et à partir du moment où on a composé ‘New Order’, le reste a découlé assez rapidement.
On a vraiment le sentiment que cet album a été difficile à mettre en route entre le fait de faire accepter le partage le bébé de JJS notamment et à partir du moment où tout avait été clarifié, tout a coulé de source…
Antoine : Exactement ! Auparavant, JJS faisait des pré-productions où il faisait tout sur son ordinateur, il canalisait tout ! Cette fois-ci, nous sommes au studio d’enregistrement de Francis Caste, on a fait les pré-prod chez lui, on a découvert les morceaux un mois avant l’entrée en studio et en studio, JJS a pu rajouter plein de choses et en particulier sur le titre ‘Stellar Cross’ où il y a plein de travail sur les ambiances, les atmosphères…
On se complète énormément avec JJS -je suis plus un guitariste rythmique- et c’est lui qui a posé les bases du groupe et c’est lui qui lui apporte cette dimension.
Quand le groupe a été monté, nous n’étions rien, nous ne connaissions personne et nous ne pensions jamais en arriver là !
"Ascension" clôt une trilogie donc. Vos albums sont reliés les uns aux autres par un canevas identique, une même inspiration et une identité visuelle très reconnaissable due au duo Førtifem. De fait, vos créations forment un tout, une espèce de globalité. Est-ce que cette trilogie à l’identité forte était prévue dès le départ ?
Antoine : La trilogie n’était pas prévue. On aime bien fonctionner par accident et ça s’est donc fait tout simplement au fur et à mesure. Quand le groupe a été monté, nous n’étions rien, nous ne connaissions personne et nous ne pensions jamais en arriver là !
Après, l’univers est un kiff personnel, c’est exactement ce que je voulais faire ! Quand j’étais adolescent, j’étais fasciné par des groupes comme Emperor -je lisais les paroles, les visuels… très importants dans le metal. Et je trouvais que c’était quelque chose d’assez souvent délaissé dans le metal français : tu avais des groupes qui faisaient de la super musique et qui s’exprimaient de manière pourrie.
Nous faisons une musique immersive, narrative et il est important d’avoir un concept mais le concept n’est pas là pour enfermer l’auditeur parce que je te le disais tout à l’heure, tu peux avoir différentes interprétations.
Le verbe n’est pas premier, c’est la musique avant tout et ensuite, on essaie de construire quelque chose de cohérent par rapport à ce que l’on imagine.
A la base, nous ne voulions pas avoir de photo de nous-mêmes, nous voulions faire un truc un peu fermé à la Deathspell Omega mais nous ne sommes pas partis là-dessus parce qu’on aime les concerts.
Tu parles d’Emperor, autant je ne suis pas du tout convaincu par l’évolution d’un Opeth qui avait créé un style pour désormais faire du King Crimson, autant ce que fait Ihsahn en solo en expérimentant son metal est extrêmement intéressant par rapport à ses débuts avec Emperor…
Antoine : Exactement et ce qui est intéressant avec Ihsahn c’est qu’il avoue qu’Emperor était un truc d’adolescent !
On attend principalement de faire des choses qu’on n’a jamais faites
c’est-à-dire tourner le plus possible et de montrer que nous sommes
vraiment là et que nous sommes là pour durer.
Qu’attendez-vous de ce nouvel album ?
Antoine : On attend principalement de faire des choses qu’on n’a jamais faites c’est-à-dire tourner le plus possible et de montrer que nous sommes vraiment là et que nous sommes là pour durer. Avec Regarde les Hommes Tomber, on a eu la chance rapidement d’avoir un public qui a nous suivi : on a pu faire beaucoup de concerts…
… et c’était une surprise d’être aussi rapidement adoubé par le public ?
Antoine : C’est incroyable !
On a de la chance parce que d’excellents groupes qui ne percent pas, il y en a des tonnes !
Et comment l’expliquez-vous ?
Thomas : Je pense qu’on a de la chance parce que d’excellents groupes qui ne percent pas, il y en a des tonnes ! C’est un mélange de pas mal de paramètres mais la chance y est pour beaucoup !
Antoine : Il faut prendre la musique que l’on fait au sérieux. Nous n’avons jamais essayé de ressembler à tel ou tel groupe. A la base, Regarde les Hommes Tomber était le projet introspectif de JJS qui est une personne assez particulière, assez solitaire… nous avons ensuite échafaudé quelque chose autour, nous avons jeté les bases d’un truc sincère avec un concept cohérent qui a plu…
Et cette journée promotionnelle sans le créateur du groupe, est-ce une volonté ?
Thomas : En fait, c’est un peu par hasard. Il n’était pas possible de faire cette journée à cinq sinon ça aurait été le bordel…
Antoine : En toute honnêteté, il s’est un peu moins impliqué sur cet album. Le groupe est moins son projet personnel…
On a commencé par la question qu’on vous a trop souvent posée, au contraire quelle est celle que vous souhaiteriez que je vous pose ou à laquelle vous rêveriez de répondre ?
Thomas : Elles sont vraiment sympas tes questions ! Je trouve tes questions très pertinentes, on voit que tu as creusé le sujet donc merci à toi : il y a souvent pas mal d’interviews où finalement on répond à des questions hyper bateau et standardisées, ce n’était pas ton cas !
Antoine : Après, j’aime bien les questions relatives au concept mais je suis fan de musique et quand je lis des interviews, j’aime savoir ce que les artistes ont aimé…
Qu’est-ce que tu as aimé ?
Antoine : Pour ma part, je suis un gros fan de Magma. Je n’écoute pas de progressif mais j’aime bien Magma. J’écoute le dernier Magma "ZËSS"…
… qui est la finalisation…
Antoine : … d’un vieux morceau des années 1970. Christian Vander avait dit que si jamais il enregistrait ce morceau, c’était la fin du groupe. Mais en fait, après coup, il s’est dit que ce pouvait être un songe et donc si c’est un songe, ce n’est pas la fin du groupe : je trouve ça génial ! J’adore, c’est passionnant ! Et l’album est très bon !
Et j’écoute également le dernier Deathspell Omega…
Merci
Antoine : Merci à toi !
Thomas : Et vraiment merci pour les questions, c’était vraiment intéressant !
Merci à Childeric Thor pour sa contribution...