'Les yeux de Laura' ont toujours quelque chose à dire. La chanson fêtait en 2021 ses 35 ans d'existence. Music Waves a voulu en savoir un peu plus sur l'histoire de Goûts de Luxe. Rencontre avec Jacques Le Honsec, chanteur et fondateur du groupe.
Vous avez grandi dans les années 70 considérées comme un Âge d'or musical, comment êtes-vous tombé dans la potion magique de la musique ?
Je suis né en 1963. Vers l'âge de 14 ans, j'échangeais des vinyles avec des potes. Il y a trois albums que j'ai achetés le même jour : les
Sex Pistols,
Pink Floyd et
Donna Summer. Ça détermine assez bien ce que je suis musicalement. Toute la période punk qui va des
Ramones aux
Clash, le disco avec
Donna Summer et
Pink Floyd, c'est progressif mais c'est aussi de la pop...
Par rapport à ces groupes anglophones, est-ce la raison pour laquelle vous avez fait une fac d'anglais ?
Ma mère voulait que je sois avocat. Mais ce ne me plaisait pas trop. J'ai eu la chance d'avoir des parents qui m'envoyaient régulièrement passer un mois en Angleterre. J'avais 18 de moyenne en anglais toute l'année. J'y suis resté 6-7 mois avant de partir à Paris.
Vous aviez un groupe, Clito. 'Les Yeux De Laura' a-t-elle été composée à cette période ?
C'était un peu après mais il y avait déjà un soupçon de
Goûts de Luxe. J'étais avec Jean-Eric Monfort et d'autres gars. On avait déjà le refrain.
Vous avez décidé de monter à Paris. Mais est-ce que vous vous êtes dit : “J'y crois toujours, je vais faire ma maquette” ou est-ce que vous vouliez surtout réussir professionnellement pour ensuite tenter votre chance en musique ?
J'avais trouvé un job à Paris et un appart', alors j'ai proposé à mes camarades de venir me rejoindre. Mais ils n'ont pas suivi. Je travaillais à Champs Disques, un magasin de disques aux Champs-Elysées. J'étais au contact direct avec les maisons de disques.
Axel Bauer venait voir si on vendait ses disques au début de "Cargo". Je me suis fait un carnet d'adresses. A ce moment-là, Jean-Eric était finalement venu me rejoindre avec un troisième larron qui n'est pas resté longtemps. On a pu faire une
maquette qu'on a payée avec nos sous. Une de ces cassettes est arrivée un jour sur le bureau de Dominique Dubois de Polydor, celui qui a écrit entre autres 'Voyage Voyage' de
Desireless ou 'Des Gens Stricts' d
'Animo.
Vous avez même rencontré Supertramp !
Le mec qui avait donné la maquette à Dubois était directeur artistique chez Polydor (c'est lui qui chante sur les refrains des 'Yeux de Laura' et de 'Ubik'). Un jour, il m'a proposé de l'accompagner à un plan promo. J'ai fini à la table de
Supertramp avec qui j'ai discuté toute la soirée dans la bonne humeur. Le lendemain matin, alors que je travaillais à Champs-Disques, qui vois-je débarquer dans le magasin ? Les mecs de
Supertramp qui me reconnaissent : “Jacques, how are you ?” C'était mon moment de gloire.
C'est à cette période-là que l'on retrouve un autre Breton, Alain Le Govic qui aurait eu entre les mains votre maquette de 'La Fille De Pékin'.
J'avais rencontré la secrétaire d
'Alain Chamfort. Je lui avais montré ma maquette sur laquelle il y avait 'Les Yeux De Laura' et 'La Fille De Pékin'. Elle était plus intéressée par le deuxième titre mais elle nous a fait comprendre qu'elle voudrait la faire chanter par
Alain Chamfort. Nous avions refusé, c'était notre chanson après tout. Maintenant avec du recul, je me dis que c'est un peu bête.
Vous allez faire une rencontre déterminante : Karl Lagerfeld !
A l'époque, nous recevions les disques avant tout le monde. Avant même que cela passe en radio. Nous écoutions tout et on faisait une présélection sur ce qui allait marcher. M. Lagerfeld me faisait confiance. Quand il débarquait avec Inès de la Fressange, je lui faisais écouter deux trois trucs. La semaine suivante, il revenait et me disait (il imite l´accent allemand) : “Jacques, ça j'ai bien aimé. Ça un peu moins.”. J'ai été son vendeur pendant deux ans et puis un jour au-dessus de la pile j'ai mis ma cassette. Mais je n'ai pas eu de nouvelles tout de suite et je n'osais pas lui demander s'il avait écouté. Un jour, il m'a invité à un défilé Chanel. J'étais très intimidé, car je n'étais qu'un petit vendeur qui débarquait dans un autre milieu. Le défilé commence et j'entends les premières notes des 'Yeux De Laura' avec Linda Evangelista qui défile sur l'intro. Ce sont des moments incroyables pour un jeune mec. Je l'ai remercié ensuite. Il m'a dit que ça lui avait fait plaisir.
Deuxième rencontre décisive : Marianna Kliska, qui deviendra votre partenaire et votre femme. Selon la légende, elle serait venue un jour aux bras d'un de ses amis en vous désignant : “James, je te présente l´homme de ma vie”...
Elle était copine avec Dominique Dubois et le directeur artistique de Polydor qui m'avait emmené chez
Supertramp. Je la connaissais depuis longtemps et je la trouvais belle. Un jour elle a débarqué et a dit à son amoureux : “Je te présente l'homme de ma vie”; Marie était en avance sur son époque. C'était une des premières filles indépendantes. Elle avait une culture que je n'avais pas et une sensualité particulière par rapport à la culture. Elle était la secrétaire personnelle de Robert Hersant, le directeur du Figaro de l'époque. Elle gagnait bien sa vie par rapport à moi mais un jour elle m'a a annoncé qu'elle venait de démissionner à cause d'un publi-reportage sur Jean-Marie Le Pen qui allait passer gratuitement dans le journal.
Marie était en avance sur son époque. C'était une des premières filles
indépendantes. Elle avait une culture que je n'avais pas et une
sensualité particulière par rapport à la culture.
Est-ce que les séances étaient longues parce que Dominique Dubois voulait vous faire sonner plus commercial ou est-ce que c'est parce que vous étiez plutôt perfectionnistes ?
Dominique Dubois avait un deal avec le studio du Palais des Congrès, que l'on pouvait utiliser lorsque celui-ci était libre. Nous pouvions commencer à 21 heures et finir à 8 heures du matin. J'ai découvert le studio avec Dominique. Ce n'était pas un musicien mais un technicien du son. Il avait toute l'armada du moment, Emulateur I, II, DX1, DX7, TX802... On a appris beaucoup sur place car nous avons expérimenté. Dans 'Les Yeux De Laura', on a une fl
ûte dont le son vient d'un album de
Dead Or Alive. C'était la première fois que je chantais avec un micro. Et comme je venais de Brest, j'avais un accent. Il a fallu qu'on le gomme. Nous avons passé beaucoup de temps à enregistrer ce titre car il avait fallu apprendre sur le tas. Évidemment il y a eu des tensions, mais des tensions constructives.
Et pourtant, vous allez subir votre premier départ.
Marianna était tout le temps en studio. Jean-Eric aussi, mais moins car il était contrôleur aérien. Jean-Eric n'avait pas de matos, alors Dominique Dubois, qui voulait améliorer le son, a fait venir Kamil Rustam pour lui filer sa guitare. Mais Jean-Eric était perdu. Alors, c´est Kamil Rustam qui a enregistré la partition de guitare. Jean-Eric et moi, nous sommes allés faire une télé à FR3 Rouen mais faire semblant de jouer un morceau qu'il avait écrit mais qu'il n'avait pas pu enregistré, ça ne lui plaisait pas. On est toujours super potes avec Jean-Eric aujourd’hui. Après son départ, Marianna a intégré le groupe.
La pochette de disque a été refaite (on voyait un vitrail et les visages de deux garçons). Mais avec le départ de Jean-Eric, la nouvelle pochette vous montre vous et Marianna.
Sur la deuxième pochette, on s'est pris mutuellement dans notre appartement sous une pauvre lumière en guise d'éclairage. Lorsqu'on a développé les photos, elles étaient orange ! La maison de disques les a vues et a trouvé ça génial. Elle nous a donné de l'argent pour payer le photographe ! Nous n'avions plus un rond. A la sortie du disque, j'ai donné ma démission. Ce n'était plus possible de faire les deux. Je devais aller à Bordeaux
un jour et à Metz le lendemain. Mais ça ne nous rapportait rien. Le seul
truc positif, c'était que la maison de disques nous payait à manger le
midi.
L'étape suivante sera le mixage. Vous avez travaillé avec Dominique Blanc-Francard qui vous aurait dit : “Mais personne n´a jamais fait ça avant !” Est-ce que ce n'est pas un commentaire à double tranchant, car l'originalité n'est pas toujours gage de réussite en France ?
Non, c'était un vrai compliment. Il a amélioré le son de batterie. Et il a eu raison car sinon ça n'aurait pas fonctionné autant. Il était aussi très fort pour mixer les voix. Il avait un talent pour embellir ce qui était sur la bande. Il avait fait
M 'Pop Music' mais il s'était fait entuber sur l´affaire par Robin Scott, qui était parti avec les bandes en Angleterre sans lui filer de blé. On a eu des relations sympathiques, sans aucun rapport de force.
Dans l´introduction de la chanson, on trouve des influences du 'Blue Monday' de New Order ou du trépidant 'Quiet Life' de Japan. On se dit qu'avec ce son, nous ne sommes plus en France.
Ce gimmick c'est un truc de guitare joué au synthé. Il y a un son au début de chaque mesure qui est un son de cithare DX7. Je suis un grand fan du bruit blanc, ce qui fait crrrrr, qui permet d'avoir une forme de clap. Toute la ligne de basse est émaillée de vélocité ce qui lui donne un esprit vivant au DX7 comme une basse qui slappe. Le synthé sur les couplets qui fait tacatacatac provient de
Frankie Goes To Hollywood, mais en plus rapide.
Je suis un grand fan du bruit blanc.
Les paroles jouent beaucoup sur les sonorités et sont très poétiques, notamment “le vice hélas lu dans les doux yeux verts”.
J'avais les refrains mais je galérais sur les couplets. Je les ai écrits en deux heures... En fait, je ne sais pas de quoi parle la chanson si ce n'est que c'est un collage de mots. Ric Ocasek des
Cars m'a beaucoup influencé. Le Alice dont parle la chanson c'est
Alice Cooper. J'ai un peu la sensation d'être dans 'Idées Noires' de
Bernard Lavilliers, une sorte de polar où on retrouve un cadavre avec des yeux qui n'ont plus rien à dire. Le titre est inspiré du film ''Les Yeux De Laura Mars.''
On a également un
sample de James Dean dans "La Fureur De Vivre", qui ajoute une
autre dimension à la chanson. Pourquoi avoir choisi cet extrait du
film ?
J´avais le vinyle
des trois films sorti par la Warner avec James Dean. Et on a décidé
de l´utiliser au moment où on avait un son assez trépidant.
Sur la pochette des 'Yeux De Laura', on voit un remerciement à Printemps Noir, le groupe d'un certain Miossec. Dans "On n´est pas couché" en 2007, Miossec n'a pas démenti les approximations d'un Laurent Ruquier suggérant que vous lui aviez volé 'Les Yeux de Laura'.
Christophe jouait dans
Printemps Noir. A l'époque, Christophe habitait à 500 mètres de chez moi. On s'est piqué aussi des gonzesses et on s'est fâché. Un jour, au moment du tube, nous sommes allés au drugstore Opera et il était caissier. ''Ça va, Christophe ?''. Et il n'a pas répondu. Je ne sais pas comment tout a démarré. Au tout début de
Miossec, il a peut-être eu besoin de dire des tas de choses. Je l'ai vu des années plus tard. C'est incroyable, j'habitais dans le 18ème et il est venu s'installer en face de chez moi ! Mais tant pis pour lui, ça ne m'affecte pas.
Le clip aurait du être tourné par Laurent Boutonnat mais finalement il a été réalisé par vos soins. Il s'agit d'un des meilleurs clips français avec une atmosphère expressionniste et futuriste entre "Rue Barbare" et "Blade Runner". On a des punks, des policiers sadiques, des détectives interlopes. Comment avez-vous trouvé l'idée ?
Nous avions fait une réunion de travail chez Laurent Boutonnat qui s'était bien passée. Pourtant quelques jours plus tard, la maison de disques nous a appelé pour nous dire que Laurent Boutonnat ne ferait plus le clip. Nous avions appris ensuite que Mylène avait refusé de laisser partir son mentor. Laurent Boutonnat nous a conseillé Stéphane Lambert pour le remplacer mais il ne correspondait pas à notre univers. Nous lui avons fait une proposition : tu t'occupes de l'aspect technique et tu nous laisses faire. C'était compliqué mais chouette à faire. Ça nous a pris une nuit au Moulin de Pantin, détruit depuis. Quand on a fini le clip, on avait pas de tunes pour rentrer à la maison en taxi, donc on a pris le métro.
Le titre cartonnait déjà au moment du clip ?
A l'époque, Jean-Marc Malairan qui était au marketing était tombé sur notre pochette et s'était dit : “Ils sont mignons ces deux-là. On va mettre le paquet dessus". Warner sortait d'une période faste mais galérait pour trouver des signatures. A partir du moment où la machine Warner s'est déclenchée, c'est devenu énorme. Du coup, on s'est retrouvé à passer sur toutes les radios. Sauf NRJ qui n'aimait pas le titre... Et les gens ont fini par acheter le single. Un jour, dans notre petit appartement, le téléphone a sonné et nous avons appris que la semaine prochaine, nous rentrions au top 50. On s'est serré dans les bras, Marie et moi. On vivait une période
difficile. On crevait la dalle. On gonflait un peu les notes de taxi que
la maison de disques nous remboursait.
“Ils sont mignons ces deux-là. On va mettre le paquet dessus.”
C'est à cette époque là que vous avez fait des passages télé.
Notre première était chez Childéric. Nous étions tétanisés. On en a fait tellement, une centaine. A la fin, c'était comme aller chez le boulanger. Il n'y avait plus rien, la seule grande aventure, c'était de changer de fringues. C'est l´exposition, l'acquisition de notoriété qui agit.
Y a t-il-eu des passages mémorables ?
Jacques Martin le dimanche. On doit descendre l'escalier monumental, se mettre Marie aux claviers et moi au chant. Mais je ne m'entends pas, je suis complètement à côté, c´est faux. Et tout d'un coup, coupure d'électricité. On doit attendre que ça revienne pour recommencer. Miracle ensuite, je fais la chanson nickel chrome.
Nous allons passer au deuxième single : 'Omaha Beach'. Sur votre site, vous avez dit que c´était la chanson dont vous étiez le plus fier.
La plupart des gens me parlent plus d' 'Omaha Beach' que des 'Yeux De Laura'. On n'est même pas rentré au top 50. C'était la première fois que je rentrais en studio et que j'étais seul à la prod. J'avais rencontré Patrice Tison, un grand guitariste. Nous pouvions faire la pochette de nos rêves. J'ai écrit les paroles le jour de l'enterrement de ma
grand-mère. Quand le cercueil est descendu dans la fosse, les mots Omaha
Beach me sont venus. Cela parle de deux plages. La première, c´est Omaha Beach, la deuxième Le
Trez Hir à côté de la plage où je vivais moi et aussi
Miossec, qui faisions partie d'une bourgeoisie
locale. J'étais très content de cet enregistrement.
Il y a aussi un clip ou une télé ?
C'est une télé en Guyane. Nous devions faire le clip avec Dominique Issermann. On a tout écrit et au dernier moment la maison de disques nous a lâchés. Jean-Marc Malairan et son équipe ont été virés et les nouveaux ont stoppé la promo d' 'Omaha Beach' du jour au lendemain. Dominique Isserman a réutilisé tout ce que nous avions créé pour le clip de 'First We Take Manhattan' de son compagnon
Leonard Cohen. On peut quasiment mettre la musique d' 'Omaha Beach' dessus.
Je trouve que la Face B 'Ubik' est supérieure à la Face A.
C'est un morceau très ambitieux. J'aurais voulu le sortir en single mais la maison de disques ne voulait pas. C'est un morceau expérimental. Sur le passage avant le solo de guitare, il y a une bande de marimba qui est arrêtée, j'appuie sur le bouton, cela démarre à une vitesse inférieure et puis je change la vitesse puis je l'augmente. Je suis très fier de ce morceau-là, en plus le livre est génial. C'est mon hommage à Philip K. Dick.
Vous avez repris 'Fade To Grey' de Visage qui figure sur le maxi de ''Omaha Beach''.
On avait décidé avec Marie de faire une reprise pour nos galas. Histoire d'avoir un truc qui représente l'esprit du groupe. Ça marchait très bien car des gens pensaient que nous avions écrit l'original. On l'a fait écouter comme ça à la maison de disques qui a décidé de l'inclure.
Dernier single, 'Dans Un Autre Pays', on retrouve cette attirance pour les sonorités : “Il y a malice au pays des merveilles” ou encore “Judith, au jeu, triche et se fâche”. On part au-delà de Laura.
Nous nous étions fait virer de chez Warner et nous nous étions retrouvés chez EMI où venait de s'installer Jean-Marc Malairan. Mais la promo de chez EMI voyait d'un mauvais œil l'arrivée de deux personnes de Warner. On s'est retrouvé au milieu d'une bagarre de maisons de disque. Le disque était sorti mais pour une raison inconnue, nous n'arrivions pas à passer à la radio. La promo nous avait dit qu'elle attendait le bon moment mais en fait elle avait donné l'ordre de ne pas la passer. On a décidé de laisser tomber.
Le clip faisait référence à "Alice au Pays des Merveilles"- malheureusement celui-ci a disparu ?
On peut le voir sur la page Facebook de
Goûts de Luxe. Nous avons travaillé avec David Rochline plusieurs jours sur le décor. Il a fait aussi 'Toutes Les Filles Pleurent' de
Lio, on retrouve les mêmes plans dans ce clip. Pour l'anecdote, c'était le beau-frère de Gérard Garouste. Tout est faux, en polystyrène mais le résultat est vraiment bien.
Sur la face B, 'Last Train' ressemble un peu à du Yello. Ce qui veut dire que Goûts de Luxe était capable de prendre de nouveaux chemins tout en sonnant toujours Goûts de Luxe ?
'Last Train', c´était une vraie compo de Marie et de moi. C'est le chant du cygne. Je voulais faire un morceau super simple, une ligne de basse et une boite à rythme, un faux harmonica et une fausse guitare, c'est un synthé passé dans une distorsion. J'aime bien ce morceau-là et en plus il a été repris dans des compilations
underground.
C'est le dernier morceau enregistré sous le nom Goûts de Luxe. Mais qu'en-est-il de 'Gris Comme La Pluie' ? Cela aurait pu devenir un morceau d´adieu.
On a enregistré 'Chagrin Secret' avant 'Gris Comme La Pluie'. A la sortie de 'Dans Un Autre Pays', j´ai vu deux trois copains chez Sony. On m'a dit qu'on pouvait signer mais qu'il fallait un album, ce qui était hors de question. J'aime beaucoup 'Gris Comme La Pluie', qui parle de notre chat qui est parti puis est revenu un an plus tard.
C´est l'exposition, l´acquisition de notoriété qui agit.
Goûts de Luxe s'arrête donc. Est-ce d'un commun accord ou y a-t-il eu des foudres entre toi et Marianna ?
Non pas du tout, on était marié mais le groupe c'était fini. Nous n'allions pas repartir à la recherche d'un 4ème single qui devait être un tube à tout prix. Moi, je me suis mis à bosser comme DJ. Ça n'a pas été aussi facile pour Marie que pour moi. Mais après, elle a fait une grosse carrière dans l'industrie pharmaceutique et vit en Espagne aujourd'hui. Ça a été une expérience incroyable, peu de couples ont vécu cela. Nous n'avons pas de ressenti. Nous nous aimons toujours mais différemment et nous nous voyons encore régulièrement.
Y-a-t-il eu un moment où vous vous êtes dit : “Ce serait bien de revenir” ?
On nous a proposé de faire la tournée des années 80. Nous y avons vraiment réfléchi mais nous avons décidé de refuser. Parce que c'est bien que cela reste ainsi. Les gens auraient dit : “Qu´est-ce qu´elle a morflé !”, “Qu´est-ce qu´il a pris !”. Et c´est le but du jeu. Cela permet de se rassurer sur son état de santé de public de l'époque. J'aime bien l'idée que maintenant dans des soirées gothiques parisiennes, on passe 'Les Yeux De Laura'. "Non, je ne regrette rien", dans tous les sens du terme. Ni de l'avoir fait
ni que cela soit fini. Je vis une vie zen à la campagne, je suis un
homme heureux.
Ce n'est pas parce que Goûts de Luxe s'est terminé que monsieur Jacques Le Honsec a tout arrêté. On vous retrouve sous le nom de Sly Wysiwyg pour 'Funéraille Indienne', un morceau qui figure sur la compil "Revalation".
C'était un projet avec Nick Kent, le célèbre critique et Laurence Romance. Nick Kent avait décidé de sortir un album. C'est un évènement car cela faisait 15 ans qu'il détruisait tout le monde. Nick Kent et Laurence venaient à la maison régulièrement pour préparer l'album. Mais rien n'a abouti. Certains enregistrements se sont retrouvés sur "Revalation" et une compilation qui s'appelle "Pur". C'était au début des années 90, la
french touch. On en a fourgué pas mal de "Pur". Après j'ai fait un truc 'Keep Cool (Je Vais Sortir Ce Soir)' qui s'est bien vendu, deux fois 250 000.
Est-ce que finalement tu étais à ta place derrière les consoles, loin du front ?
Oui, je suis un mec de studio. J'ai réalisé des dizaines d'albums. Je m'occupe de deux artistes dont un
Danse avec les Shlags et sa chanson 'On Marche'. On va faire l'album, on a déjà 7-8 titres, on a mixé avec des gars de
Bagarre. Ça me fait plaisir d'offrir mon expérience de studio à des garçons et des filles qui en ont besoin.
Et pourtant aux débuts des années 2010, vous avez formé le groupe Superpopcorn.
Je produisais le duo
Superpopcorn, un chanteur-guitariste, Julien Mayerus, et un batteur. Nous étions signés, nous avions une équipe de promotion. Mais un jour, la gonzesse du batteur est tombée enceinte et lui a dit : “C´est simple, soit on garde le bébé et tu t'arrêtes, soit on se sépare.” Évidemment le mec est parti. Julien m'a dit de venir mais je ne voulais pas trop mais il a insisté... Nous avons tourné, nous avons même fait les Francofolies. Mais à un moment, je ne pouvais plus suivre et on a arrêté.
C'est dommage il y avait une reprise electro d' 'Antisocial' de Trust avec un clip qu'on ne pourrait plus faire aujourd'hui à cause du Covid.
C'était chez moi ! J'ai demandé à 25-30 personnes de venir déguisées.
Tu as quand même une actualité puisque tu as fait le DJ pour la réouverture de la boîte de nuit L'échappatoire de Clichy-sous-Bois pour la nuit Blanche.
Oui, c'était une chouette aventure. Après
Goûts de Luxe, j'ai été DJ dans la discothèque de référence du 93. Ça a vraiment marqué son époque. On m'a demandé de revenir faire le DJ pour une soirée. Clichy et Monfermeil n'ont pas d'histoire, ce sont des cités bâties dans les années 60, leur histoire se raccroche à cette boîte. Il y avait ceux qui pouvaient entrer et ceux qui ne pouvaient pas mais qui faisaient tout leur possible pour rentrer.
Merci beaucoup !
C´était un plaisir...