A la veille de sortir son prochain album (1er trimestre 2014) ce vétéran de la scène Rock française organise une vente aux enchères d'objets divers en lien avec le groupe pour en financer la promotion ainsi que l'organisation de 3 concerts à l'Olympia, début 2015.
Rencontre avec Taïc-Luc (Chant-guitare) et Victoire, Responsable de l'Association qui organise cette levée d'impôt révolutionnaire, l'International
Raya Fan Club 2014 .
Qui se cache derrière l’association « International
Raya Fan Club 2014 » ?
Victoire : L’idée de base vient du constat qu’il
fallait des sous pour organiser la promotion du prochain album. Sinon cela
allait être un album de plus… sans avenir. On avait initialement pensé à
une vente aux enchères dans une salle, mais se posait le problème des gens
éloignés.
Par ailleurs, on en avait marre de s’occuper de la partie
merchandising, vente de T-shirt… Donc on s’est dit que l’on allait scinder nos
activités péri-musicale en deux parties. D’une part le label Clandestine qui
s’occupe de la Production de l’album (enregistrement, conseil artistique,
organisation de concerts…) et en parallèle une association, International Raya
Fan Club 2014, qui va prendre en charge la partie promotion, merchandising.
Pourquoi créer cette association maintenant et pas il y a 10
ou 15 ans ?
Le besoin ne se faisait alors pas sentir. Il en va de même pour notre société de Production qui a été
créée uniquement en 2007. A cette époque nous nous sommes aperçus que nous ne
faisions plus de concerts alors que nous avions un Tourneur. Nous avons décidé
de prendre les choses en mains, et depuis que nous nous chargeons nous même
d’organiser nos concerts, nous n’avons jamais autant tourné. Pourquoi ? Parce que pour qu’un Tourneur se bouge il
faut qu’il estime que le groupe ait une actualité. Si le groupe n’en a pas, il va estimer qu’un concert n’est pas viable.
Qu’elle est l’objectif de cette vente en ligne ?
Premier point important : l’IRFC
2014 est une association qui regroupe des gens bénévoles qui veulent faire
vivre La Souris Déglinguée. L’argent récolté a pour objectif de promouvoir une série de
3 concerts de LSD à l’Olympia début 2015.
Est-ce qu’un concert ne peut pas s’autofinancer ?
Oui, mais on a besoin de la promotion. On arrivera à faire venir 8 000 personnes à l’Olympia que si on a de la
promotion qui est faite en amont. Sinon, les gens n’iront pas écouter le
prochain disque, ils ne sauront même pas qu’il existe. Et comme c’est un
excellent album, on se dit qu’il faut lui donner toutes ses chances.
Il a intérêt à être bon parce qu’il aura mis le temps à
sortir…
Victoire : Oui, le précédent album, "Mékong", est sorti
il y a 8 ans, donc les gens sont dans l’attente du prochain. Il faut de
l’argent pour assurer sa promotion. Et de l’argent nous n’en avions pas. D’où
cette vente en ligne. Il faut savoir qu’une Attachée de Presse c’est au moins
3 000 € et que les achats
d’espaces publicitaires restent très chers. A ce jour, nous avons collecté un peu plus de 3 000 €,
si l’on retire 20% de TVA il ne reste que dans les 2 500 €…
Vous devez payer de la TVA sur ces ventes d’objets
« occasion » ?
Oui, c’est une obligation. Nous avons même
créé récemment sur le site la possibilité de donner 5€, 20€, 50€ sans
contrepartie, juste pour le « plaisir de donner »… et il semble
que cela doit être soumis à TVA.
Avez-vous regardé ce que faisaient d’autres groupes pour
financer leurs albums ? Comme Marillion par exemple qui fait de la
pré-vente d’album.
Nous le faisons également un peu puisque
nous vendons les nouveaux titres via mp3, mais dans un premier temps nous tenons à rester propriétaire des bandes.
Taï-Luc : et puis les choses ont changé. Lorsque nous
avons sorti nos précédents albums, ceux-ci étaient financés par une maison de
disques et ils étaient enregistrés dans un studio, le Studio
Montmartre, qui participait à l’enregistrement de nos disques. Je suis passé
devant ce studio récemment : il a été détruit et a été remplacé par des
logements. Certainement parce qu’il n’était plus assez rentable pour ses
propriétaires.
D’autres studios ont dû ouvrir…
Taï-Luc : Oui, mais tu vois ton petit enregistreur MP3
qui te sert pour nous enregistrer, en caricaturant je pourrais te dire que l’on
pourrait presque faire un album avec… Le coût de l’enregistrement d’un album a considérablement
baissé, par contre sa promotion reste un coût important. D’où cette levée de
fonds.
Vous avez indiqué un objectif de 40 000 €, pourtant
j’ai additionné les prix de l’ensemble des objets proposés sur le site et on
n’arrive pas à cette somme…
Victoire : Nous ajoutons des objets tous les jours.
Nous venons de revoir des objets d’amis. Je viens par exemple d’avoir Mickson
qui a réalisé les illustrations des disques "Mekong" et de "Citée Des Anges", il va
nous envoyer 3 de ses œuvres. J’ai contacté d’autres artistes comme Paella qui
fait du Street Art (http://www.paella2.com/), et Space Invader (http://www.space-invaders.com/) qui
fait des petits vaisseaux / Aliens en carrelage sur les murs, pour qu’ils nous
donnent des œuvres à mettre en vente. Dans le cas de ce dernier, c’est un fan
de la première heure de La Souris et il a tenu à nous aider. Et c’est une très
bonne chaise car il a le vent en poupe.
Quels sont les autres objets en vente ?
Victoire : Il y a des T-shirt, des affiches de concert,
des chansons en mp3, son nom sur la prochaine affiche de nos concerts, des
photos dédicacées, une des bouteilles du pack de 6 Heineken confiée à JF par Muzo
notre bassiste au retour du concert de Vitry le François « pour boire plus tard
» mais jamais restituée. Le pack sera dédicacé par Muzo, et sera remis en main propre
sur Paris par un membre de l'IRFC2014…
Ce n’est pas un crève-cœur de se séparer de certains
objets ? Je pense au Plate-forme boots estampillées 74’ de Taï Luc ?
Taï-Luc : (rire) Non, il ne faut pas s’attacher aux choses.
Qui a fait le texte de présentation du site ?
Victoire : C’est moi, pourquoi ?
Je trouve ça très… pompeux… le terme n’est pas forcément
juste. Ca reflète toute la communication de La Souris Déglinguée.
Victoire : Trop pompeux ?
Non, mais il ressort de la communication verbale du groupe comme
une sorte de communautarisme alors que le groupe est très ouvert. Vous parlez
en langage codé, comme si vous ne vous adressiez qu’à des initiés. Vous faites
de nombreuses références à des évènements, des personnes du passé…
Victoire : Cette fois ci, c’est moi qui m’y suis collé
parce que personne ne voulait le faire. Et on m’a conseillé de procéder par slogan. Mais de manière générale, la communication vient de Taï Luc
car cela n’intéresse pas les autres membres du groupe. Et Taï Luc il écrit
comme il parle, c’est-à-dire de manière très allusive. Lorsqu’il a fait sa
thèse de Doctorat en linguistique, un des membres du jury disait
« Monsieur Nguyen, vous dites des choses extraordinaires mais vous faites
en sorte que les gens ne comprennent pas ».
Mais est-ce
volontaire, est-ce travaillé ?
Taï-Luc : J’ai toujours fait les choses par défaut. Par
exemple, au départ, je n’aime pas chanter. Moi je préfère acheter des disques
que de jouer un instrument de musique. Il se trouve que je me suis trouvé en
position de jouer de la guitare.
Lorsque l’on a fait ce groupe avec les uns et les autres on
ne faisait que des reprises du Velvet, de Lou Reed, de Chuck Berry. Et je
trouvais cela très bien. Il se fait que l’on a vu des groupes en Angleterre
en 77, et à la suite de cela on s’est dit que peut-être on pourrait faire des
morceaux originaux. A cette époque, je me suis tourné vers le copain guitariste
de l’époque, Jean Pierre, pour lui demander s’il avait des morceaux. Il m’a dit
« Nan, j’en ai pas et toi ? ». Alors c’est moi qui ai amené les
premiers morceaux. J’ai demandé qui allait chanter et qui allait apporter
les paroles. Personne ne s’est désigné alors je me suis trouvé à écrire des textes. Puis le chanteur est parti, et comme
personne ne voulait s’y coller, je me mis au chant.
Après les premiers concerts, je suis parti au Service
Militaire et je pensais que tout allait s’arrêter. Et c’est là que tout a
commencé. Le premier disque est sorti chez New Rose et je pensais sincèrement
que cela n’allait pas se vendre. Mais j’étais content parce qu’on avait un
document sonore. Le Producteur de l’époque nous a dit que l’on devait faire
un deuxième disque ». Moi je lui ai demandé : « Mais
pourquoi faire ? ». Il m’a répondu que le premier se vendait bien et
que donc on devait vite en faire un nouveau.
Et pour revenir sur la communication, moi je n’ai jamais aimé
la communication, mais comme j’ai toujours été celui qui a été mis en avant, je
l’ai fait à ma manière, celle que tu connais.
Et ça cela ne pose pas de problème dans le groupe, le fait
que ce soit toujours la même personne qui est mise en avant ?
Victoire : Non, je ne pense pas. C’est une sorte de
délégation.
Cela arrange les autres membres ?
Les autres aiment bien qu’on les interroge
sur l’histoire du groupe, mais ils sont plus occupés.
Cela fait 20 ans que le groupe existe sous sa forme
actuelle. Comme cela tient ? Pourquoi cela tient ?
Taï-Luc : Ça tient parce qu’il y a une sorte
d’alchimie.
Mais, est-ce un travail de tous les jours, ou est-ce
naturel ?
On prend tout simplement plaisir à jouer ensemble. Les membres de LSD ne vivent pas ensemble, et je crois que
c’est un des secrets de la longévité. Je crois que nous n’avons jamais mangé
ensemble en dehors des concerts. Nous ne nous voyons pas en dehors du groupe. On
n’est pas un clan, on n’est pas une famille. Ca créé une liberté très forte. Il
n’y a donc aucune raison de ce disputer parce qu’il n’y a pas de familiarité
entre nous.
D’accord, mais en 20 ans les égos doivent éroder les
relations au sein d’un groupe.
Victoire : Taï Luc n’a aucun égo. Il peut y avoir de temps en temps
quelques désaccords, mais le plaisir de jouer ensemble dépasse cela.
Pour rester dans le domaine de la communication. Qu’est ce
qui explique que le site officiel de LSD (http://www.la-souris-deglinguee.com/),
qui est une mine d’information sur le groupe, ne soit pas actualisé
régulièrement ?
Taï-Luc : En fait ce n’est pas un site officiel. Il est
administré par un jeune homme du Sud de la France, qui est fan de LSD. C’est
son initiative à partir de 1999 /2000. C’est un site partisan avec beaucoup
d’archives, mais comme nous n’avons pas la main dessus, nous ne maitrisons pas
l’information. Le forum qui est accessible via ce site est lui une source
d’information concernant l’actualité du groupe. Sinon, il faut aller sur le
site Clandestine (http://www.clandestines79.fr/),
mais c’est vrai que nous ne l’actualisons pas en permanence. Et puis aujourd’hui tout s’est déplacé vers les réseaux
sociaux. Donc si on veut des informations sur l’actualité de La Souris, c’est
sur Facebook qu’il faut aller.
Et un outil comme Wikipédia, vous y jetez un coup
d’œil ? C’est vous qui l’avez renseigné ?
Victoire : La page sur Taï Luc, c’est lui qui l’a
écrit. On a eu un peu de mal à le faire accepter par Wikipédia, parce qu’il ne
voulait pas que ce soit une liste. On a un peu discuté avec eux, et ils ont
fini par être ok.
Taï-Luc : Au départ c’est mon autobiographie réalisée
pour mon album solo, Jukebox. Il fallait un peu se mettre en avant, ce que je
n’aime pas faire. Donc je me suis dit « je vais y aller carrément, année
par année ». C’est donc une liste chronologique depuis ma naissance. Cela ne ressemble pas à un article de Wikipédia, mais cela a
été officialisé. http://fr.wikipedia.org/wiki/Tai-Luc
Je n’ai pas vu celui sur Taï-Luc, je n’ai vu que la page sur
le groupe.
Victoire : Celle-là ce n’est pas nous qui l’avons
faite. Mais il faudrait effectivement que j’aille la voir. Elle est
comment ?
Elle est très neutre. Mais j’imagine que si j’avais une page
Wikipédia, j’irais fréquemment la consulter, probablement par narcissisme… Cela
me titillerait de savoir ce que l’on dit sur moi. En gros est-ce que la
critique fait encore mal après plus de 30 ans ?
Taï-Luc : Non, je suis assez indifférent à la critique,
qu’elle soit positive ou négative. De toute façon lorsque l’on est un peu dans
le domaine public il faut faire avec…
Je n’interviens pas sur les forums, lorsque cela déconne
trop, je laisse faire. Même si je suis mis en cause (en bien ou en mal)… cela
n’a pas beaucoup d’importance. Cela m’est arrivé qu’une seule fois d’intervenir,
dernièrement d’ailleurs, pour faire une longue réponse à une personne qui
exprimaient beaucoup de ressentiments à l’égard du passé et du texte d’une de
nos chansons. Suite à l’interview dans TheGround que tu évoquais tout à
l’heure. Mais sinon, cela ne me touche pas beaucoup.
Le prochain album c’est pour quand ?
Pour très bientôt. Normalement le 24
décembre. Les MP3 devraient être disponibles à cette date. Pour le vinyle ce
sera début mars.
A quoi doit-on s’attendre avec ce futur album ?
J’ai envie de te dire que les musiciens sont
toujours les mêmes, les instruments aussi. Donc cela va ressembler à un disque
de LSD.
Cela ne veut pas dire grand-chose, parce que le style de La
Souris Déglinguée a beaucoup évolué avec le temps.
Oui, mais moi j’entends toujours la même
chose. Tu sais, le camarade bassiste qui joue avec moi depuis 1977, pour moi il
fait toujours les mêmes notes.
Oui, mais depuis il a peut-être découvert d’autres choses et
il a peut-être envie de faire autre chose ?
Quel que soit le résultat, pour moi c’est
toujours la même matière. Lorsque l’on a fait la chanson Bangkok sans aucune
guitare, cela a surpris les gens, mais sur scène, il y a de la guitare. Donc
pour nous qui fabriquons ces choses on reste toujours dans le même univers. Tu
sais, ma guitare, c’est la même depuis 1979, ma connaissance du manche elle
date de 1976… La forme est un peu secondaire. Ce sont les
morceaux en eux-mêmes qui sont importants. Tu sais, il y a un de nos albums que
l’on a remixé parce que je trouvais vraiment que la voix devait être modifiée.
Résultat des courses, on a reçu une lettre d’un fan qui nous a dit :
« C’est bien d’avoir remixé "Aujourd’hui et demain", mais nous on s’en
fout. Ce que l’on aime ce sont les chansons ». Donc pour nous un fan de LSD
aime les chansons quelque soit leur forme.
Et l’objectif du prochain est de reprendre un peu de cet
esprit que l’on retrouve dans tous les albums de La Souris.
Merci et bon courage
Merci à toi