Quelle est la question qu’on vous a trop souvent posée?
Damien Marco : La question qu’on nous a trop souvent posée ? La genèse du groupe…
Votre actu est la sortie de Pandemonium, dont la sortie est prévue pour le 25 Novembre. Il sera distribué aux USA quelques jours auparavant. Peu de groupes français ont cette chance. Comment vous sentez-vous, après cette montée fulgurante et le salut des critiques, à la veille de cette sortie?
Franck Garcia : Excité !
Damien : Très excité ! C’est vraiment énorme parce que ça nous est un peu tombé dessus comme ça. Il n’y a pas eu le sentiment de se battre pendant des années pour en arriver là : c’est assez impressionnant et en même temps, on se dit qu’on a de la chance (Rires) !
Pas seulement…
Franck : C’est flatteur et comme tu le dis, ce n’est pas seulement de la chance. Ce qui m’a plu dans la musique d’Operadyse, c’est sa fraîcheur et à mon avis, c’est ce sentiment qui interpelle.
Comment expliquez-vous cette nouvelle vague de signature de groupes français par des labels étrangers ? Un changement de mentalité ?
Damien : Je suis un peu novice dans le milieu, je n’ai pas d’élément de comparaison mais d’après ce que j’entends, ça a l’air assez rare : tant mieux, on a de la chance !
Mais c’est vrai que la scène metal française a démontré en quelques années qu’il y avait quelque chose de très intéressant et très bien fait.
Mais toi, Franck, tu l’as constaté par ailleurs, ce n’est pas si simple…
Franck : Le premier label que nous avons eu avec Spheric, c’était Replica. Donc, avant d’être signé par un label américain, on a eu une étape française alors qu’avec Operadyse, on part tout de suite avec un label international.
Vous êtes donc signés chez SPV/Attack Records. Vous êtes dans la grande cour, qu'est-ce qu'il reste à vous souhaiter de plus ?
Damien : Se développer encore parce que finalement, je vois que notre musique va pouvoir être écoutée par le plus grand nombre. Au moins, on ne pourra pas reprocher à notre distribution que le travail a été mal fait. En clair, on aura l’avis de tout le monde… Mais ensuite, ce que vous pouvez nous souhaiter, c’est de faire des concerts, une tournée et un deuxième album…
"Le metalleux français est plus exigeant avec ce qu’il écoute surtout quand ça vient de la France"
Avez-vous des contacts pour cette éventuelle tournée ?
Damien : On a des contacts avec le label et les personnes de Replica/Base qui font du super boulot. Ce sont des personnes sur lesquelles tu peux compter mais en revanche, il faut que nous nous donnions à fond de notre côté : c’est une relation de confiance mutuelle qu’il faut respecter.
Vous avez donc les contacts, les signatures, reste à attendre les retours de chronique et du public qui sont plutôt élogieuses pour l’instant…
Damien : Les chroniques les plus positives ont tendance à venir hors de France. Les supers retours viennent notamment d’Allemagne. Le metalleux français est plus exigeant avec ce qu’il écoute surtout quand ça vient de la France…
Franck : … parce qu’on est aussi comme ça (Rires) !
Votre musique navigue dans les eaux d’un Rhapsody… Pensez-vous avoir une carte à jouer au regard du flou entourant le leader du genre d’autant que le groupe français Adagio est en sommeil depuis quelques années ?
Damien : Je ne sais pas. Je sais que nous ne sommes pas là pour essayer de mettre des bâtons dans les roues. En revanche si je comprends la comparaison avec Rhapsody pour le côté épique avec une histoire en fil rouge, si tu approfondis l’écoute, j’aurais plus tendance à dire que c’est un vieux Gamma Ray symphonique.
Ma vision de la musique en la créant était plus dans cette optique que Rhapsody : quand tu écoutes un titre comme 'Nevermore' ou 'Pandemonium', je n’entends pas le Rhapsody des premiers albums.
Il faut savoir que les morceaux ont tous été composés chronologiquement à savoir que le premier titre de l’album a été le premier composé et le dernier qui clôt l’album est le dernier. Cette évolution montre l’évolution du groupe finalement. La première fois que je me suis lancé dans la composition, c’est avec le titre 'Bloodshed' : c’était une période très Rhapsody dans l’esprit et quand tu écoutes les derniers, tu te rapproches plus du power metal tel que le faisait Gamma Ray époque "Powerplant" ou "Somewhere out in Space" sans le travail des accords de guitares parce que Gamma Ray, c’est surtout ça alors que nous nous sommes plus concentrés sur l’aspect symphonique.
"Pandemonium" doit donc être perçu comme la vie d’un groupe à travers les années plus qu’un concept album comme pourrait le laisser supposer la pochette ?
Damien : Tout à fait ! Sachant qu’au niveau composition, nous ne fixons aucune barrière, nous nous autorisons tout. "Pandemonium" était un petit peu plus cadré mais il faut s’attendre à tout pour le futur, en tout cas c'est qui se profile sur les prochains morceaux, on ne va pas rester dans un style. Personnellement, j’écoute très peu de power metal, plus du Cradle of Filth, Dimmu Borgir, Septic Flesh, beaucoup de folk… et petit à petit, nos influences vont de plus en plus vers ces catégories.

Malgré tout, la pochette est très typée années 80 metal, est-ce que vous ne craignez pas d’être catalogués ?
Damien : On est d’accord, c’était un pari risqué de faire une pochette d’un ange avec une épée. Si on a voulu rester traditionnel dans ce qui se faisait dans le style, en revanche, on a la chance de travailler avec un artiste doué : on aurait pu avoir un truc tout pourri mais il a tellement sa patte que les retours qu’on a eu sur la pochette ont tous été positifs.
Franck : On n’est pas dans un style à la Warcraft mais plus Final Fantasy voire Tolkien. Et on ne parle pas tant que ça de dragon (Sourire)…
Malgré tout, rien qu’à la vision de la pochette, les auditeurs auront des préjugés sur le style musical emprunté…
Franck : En même temps, on a pas la prétention d’inventer un style : on fait du power speed symphonique et on ne souhaite pas tromper le public sur la marchandise !
"On fait du power speed symphonique et on ne souhaite pas tromper le public sur la marchandise"
Vous vous réclamez donc de cette étiquette, visuel inclus ?
Damien : On savait très bien qu'on allait être classé dans une catégorie. Mais on a fait tout ça pour le plaisir avant tout. Ca nous faisait plaisir d’avoir un ange avec une épée : on l’a fait ! Et si dans trois albums, on souhaite avoir des têtes de mort : on le fera… Il n’y a pas de démarche commerciale dans Operadyse du coup, on fait les choses au feeling… Malgré tout dans le livret, il y a des choses qui sortent un petit plus des sentiers battus en termes de dessins…
Tu as parlé de power speed symphonique, ne pensez-vous pas que l’heure de gloire du genre est passée ?
Damien : Dans le même esprit, on a joué cette musique pour se faire plaisir avant tout.
Franck : Et tout n’a pas été fait dans ce style non plus. Comme l’a dit Damien, notre musique ne va pas arrêter d’évoluer. Cet album nous a permis de poser les premières bases. Plutôt que de sortir quelque chose de plus actuel comme du black avec des growls et finalement ne pas se démarquer, on a préféré naviguer dans un style que l'on apprécie et que l'on sait faire.
Franck, tu étais jusqu’à présent particulièrement connu des lecteurs de Music Waves pour être le chanteur de Spheric Universe Experience, autre groupe prometteur de la scène metal prog : quelle est la principale différence pour toi ?
Franck : Mon travail sur les chœurs ! Je n’aurais pas pu faire le travail sur Operadyse si je n’avais pas eu l’expérience avec Spheric avant. J’ai essayé de reproduire dans Operadyse avec une touche un peu plus symphonique ce que j’ai appris au cours des sessions des différents albums de Spheric.
En fait, j’écoutais plus de power, heavy que du prog parce que sorti de Vanden Plas et de Dream Theater, influences majeures à la base, ce sont Iron Maiden et Bruce Dickinson que j'apprécie. C’est parti d’un ami rappeur qui m’a donné sa cassette de "Piece of Mind" parce que s'il avait adoré la pochette, il n’aimait pas le style musical et dès l’écoute de 'The Trooper', j’ai voulu galoper avec eux (Rires) ! C’est parti comme ça puis ont suivi Helloween…
Tu as évoqué Vanden Plas, quel sentiment au sortir de cette expérience en assurant leur première partie ?
Franck : J’ai pu serrer dans mes bras Andy (NdStruck : Kuntz, chanteur de Vanden Plas), c’était étonnant mais ce qui nous a chagriné c’est de n’avoir pu faire aucune balance le soir du concert. Heureusement, notre ingé avait préparé un pré-mix pour sauver le naufrage… Mais ça nous a miné parce que c’était un concert vraiment très important puisque nous jouions au Divan du Monde devant un public nombreux ce qui est de plus en plus rare dans le metal. On est un peu resté sur notre faim mais à charge de revanche.
Damien, le chant était précédemment tenu par Jennifer : qu’est-ce que cela change fondamentalement en termes de composition ?
Damien : Au moment de la recherche de la Nouvelle Star (Rires), il y a eu quelques personnes et nous étions plutôt partis pour continuer avec un chant féminin mais nous étions ouverts à toutes propositions. En écoutant des albums à la maison, je suis tombé sur un DVD de Replica avec la présentation d’ "Anima" du deuxième album de Spheric. Du coup, je me suis dit que la voix était typiquement power et que sur un album d’Operadyse, ça pourrait carrément le faire ! J’ai alors contacté Franck, on a travaillé sur des maquettes, des démos… On ne perdait pas la couleur, l’essence même d’Operadyse, au contraire, ça apportait du plus : c’était vraiment ce qu’il nous fallait !
Et il y a toujours un peu de chant féminin d’ailleurs…
Franck : … qui est tenu par Jennifer !
Damien : Nous sommes une grande famille !
Question line-up, Emmanuel Colombier votre batteur est également batteur d’Ultra Vomit. Qu'est ce que ça lui fait de passer à un groupe sérieux ?
Damien : (Rires) Si Emmanuel est quelqu’un qui aime s’amuser, finalement, il a besoin de jouer dans des projets sérieux… D’un côté, tu as le côté tel qu’il s’affiche avec le côté parodique d’Ultra Vomit où il déconne tout le temps et de l’autre, ce n’est pas le même personnage. Il a un gros désir de jouer du heavy dans des productions un peu plus conventionnelles.
Dans ces conditions, n’avez-vous pas peur d’être catalogué comme un projet plus qu’un groupe ?
Franck : Non ! Je ne le sens pas comme ça parce que je n’ai pas envie d’intégrer un groupe, balancer de l’énergie juste pour dire que j’ai posé ma voix sur tel album. Si je sentais que le projet regroupait plein d’artistes différents, je serais peut-être venu aussi mais je n’aurais pas eu la même implication. Je me suis investi à 100% avec Damien. Si d’ailleurs nous sommes ici face à toi à discuter avec toi, c’est grâce à mes contacts avec Replica via Spheric. Operadyse est aussi important que Spheric Universe Experience et je mets autant d’énergie dans un groupe que dans l’autre.
Et comment s'est répartie la composition de "Pandemonium", à écouter cette interview, il semblerait que ce soit surtout toi, Damien ?
Damien : Il paraît (Rires) !
Cet album a été je pense composé avant l’intégration de Franck. Est-ce que ton arrivée va changer certaines choses en termes de composition ?
Damien : Comme je le dis toujours, je suis ouvert à toutes propositions. C’est vrai que pour cet album, beaucoup de choses étaient définies, nous étions dans les starting-blocks : l’album était totalement écrit au moment de l’enregistrement, chacun n’avait plus qu’à apporter sa patte.
Je considère le deuxième album comme une porte pour créer de nouvelles choses, percevoir de nouveaux horizons en intégrant les influences des membres qui participeront à la composition. Chacun viendra avec ses idées qu’on essayera d’intégrer si elles sont biens et si c’est moisi, on ne le fera pas. Mais en général, on a assez de recul sur ce genre de discussions pour savoir ce qui est bien ou pas.
Franck : Damien compose souvent des trucs de 2-3 minutes qu'il vire s'il n'aime pas et qu'il nous envoie si il pense qu'ils ont du potentiel… Et parfois, il n'attend pas qu'on lui réponde avant de finalement les jeter (Rires) ! Il est très critique envers lui-même et je trouve ça très bien !
Damien : il ne faut pas mettre trop de règle : la vie est trop courte pour s’emmerder (Rires) ! Tous les membres d’un groupe ne participent pas à la composition d’un album : je sais que Franck est très dans cet optique, les autres membres beaucoup moins. C’est pourquoi on discute beaucoup avec Franck parce que je sais qu’il a beaucoup d’idées à apporter et qu’il a envie de s’exprimer. D’ailleurs, si tu as la version japonaise de l’album, tu découvriras le premier titre composé par Franck et Damien (Rires) !
"Operadyse est aussi important que Spheric Universe Experience et je mets autant d’énergie dans un groupe que dans l’autre."
Et pourquoi seulement la version japonaise ?
Franck : On ne s’y attendait pas mais c’était une des conditions du label japonais pour être distribué là-bas : il fallait un titre exclusif.
Sans transition, quel est votre meilleur souvenir en tant que musiciens ?
Franck : Pour ma part, j’en ai deux. Avoir fait la première partie de Scorpions avec Spheric et le festival Progpower à Atlanta.
Damien : Je ne sais pas. Je n’ai pas réellement assez de vécu pour l’instant mais à ce jour, ce qui me passionne le plus : participer à la compo et voir le projet grandir.
Au contraire, quel pourrait être le pire ?
Damien : Pour les mêmes raisons, je n’ai pas assez de vécu et de recul pour avoir de pire souvenir.
Franck : De mon côté, je n’ai pas souvenir de crasses terribles…
Nous avons commencé avec la question que l'on vous a trop souvent posée. Au contraire, quelle est celle que vous aimeriez qu'on vous pose enfin ?
Damien : Elles sont pas mal tes questions : je dirais celle-là (Rires) !
Franck : Je n’ai pas de question mais pour pouvoir mettre en avant le groupe, ce que j’ai senti de frais dans la musique d'Operadyse et que je ne retrouvais pas ailleurs, c’était le mélange Hans Zimmer et le côté manga/ japanim’…
Damien : Dans le metal, les gens écoutent trop un style, il faudrait qu’ils écoutent plus la musique !
Certes mais tu admettras que tu es un peu en contradiction en incitant les amateurs de metal symphonique à venir vers toi avec ce visuel…
Damien : Oui mais on peut faire un croche-pied pour le deuxième album (Sourire)…
Franck : … avec une pochette avec Son Gokû ou Sain Seiya (Rires) !
Un dernier mot pour les lecteurs de Music Waves ?
Damien et Franck : Keep the Flame !
Merci beaucoup
Damien et Franck : Merci à toi
Et merci à Noise pour sa contribution...