PETER HAMMILL: Other World (ROCK ATMOSPHERIQUE,Rock Alternatif) : avis / chronique à lire sur Music Waves

A 65 ans passés, Peter Hammill a su garder une fraicheur et une envie d'explorer des voies nouvelles qui l'incitent régulièrement à essayer de repousser ses limites toujours un peu plus loin. Ainsi est-il toujours partant pour des collaborations un peu folles, prenant le risque de bâtir des albums sur des trames à peine esquissées sur lesquelles l'improvisation ou la construction spontanée issue d'on ne sait quelle alchimie tiennent lieu de processus créatif.

C'est ainsi qu'il a essaimé dans sa pléthorique discographie des ovnis tels "Spur Of A Moment" avec son vieux complice Guy Evans, "The Appointed Hour" avec Roger Eno ou, au sein de son groupe Van der Graaf Generator, le second CD de "Present". "Other World" est le fruit d'une nouvelle collaboration avec le guitariste new-yorkais Gary Lucas, né d'une admiration mutuelle de longue date. Gary Lucas est un virtuose de la guitare qui a notamment accompagné Captain Beefheart, Jeff Buckley, Lou Reed, John Cale, Bryan Ferry, Patti Smith, ou encore Iggy Pop.

Si Peter Hammill est déjà un artiste atypique lorsqu'il produit des albums "classiques", il est capable du pire comme du meilleur lorsqu'il se livre à ses penchants pour l'improvisation et les expérimentations tordues et il faut bien avouer que certaines de ses réalisations finissent sur une étagère poussiéreuse, le plaisir se trouvant plus dans la satisfaction du collectionneur avide d'exhaustivité que de l'auditeur mélomane.

C'est donc avec une certaine circonspection que j'abordais ce qui me semblait, de prime abord devoir relever de cette dernière catégorie. Méfiance injustifiée, du moins partiellement. Car si "Other World" contient bien des moments d'expérimentation pure et d'improvisations, la plus grande partie du matériel revêt les atours de chansons conventionnelles … autant que ce terme puisse être appliqué à Peter Hammill.

Les amateurs en bizarrerie et sons incongrus jetteront donc une oreille sur 'Built From Scratch' (bruits de machines et circonvolutions de guitares), 'Reboot' (un titre qui s'apparente plus aux bruitages d'un film de guerre retraçant une attaque aérienne avec tirs de DCA, largage de bombes et descentes d'avions en piqué qu'à de la musique proprement dite) et 'Means To An End' (boucles hypnotiques de guitare et sons fusant). Egalement totalement instrumentaux, mais plus mélodieux, 'Attar Of Roses' est une improvisation pour deux guitares intimiste et romantique quand 'Glass' et 'Slippery Slope' donnent dans l'atmosphérique ouaté, le premier dans un style cher à l'école berlinoise. Tout aussi atmosphérique, mais chanté cette fois, 'Two Views', évanescent et fantomatique, se livre par lambeau, un peu comme sur "Thin Air". Les autres titres semblent revisiter au hasard l'œuvre de Peter Hammill, mêlant ballade tendre ('Spinning Coins') ou sombre ('Of Kith And Kin'), univers menaçant et tourmenté ('Some Kind Of Fracas', alter ego de 'Reboot', 'Cash') ou rock acide ('This Is Showbiz', 'Black Ice'), le meilleur titre de l'album étant sans doute le touchant 'The Kid', excellent compromis entre classicisme et interprétation originale dont Hammill garde le secret.

Fidèle à son, ou plutôt ses styles, Peter Hammill ne parviendra pas à séduire ses détracteurs avec ce nouvel opus, à moins que ceux-ci ne soient subjugués par le délicat travail de dentellière réalisé par Gary Lucas et sa guitare. Ce disque n'est pas non plus la porte d'entrée idéale pour le néophyte, l'éclectisme des titres conjugué au caractère expérimental ou improvisé de bon nombre de ceux-ci pouvant dérouter. Seuls les sectateurs du maître grappilleront quelques moments de plaisir au sein d'un album un peu inégal. - Site officiel

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