LAIBACH

(SLOVENIE)

WIR SIND DAS VOLK

(2022)
LABEL:

PIAS

GENRE:

AUTRES

TAGS:
Chant féminin, Chant grave, Concept-album, Dissonant, Folk, Happy, Intimiste, Mélancolique, Opera-Rock, Théatral
"Avec "Wir Sind Das Volk", Laibach réussit à convertir en musique, en bruit et en fureur les écrits tourmentés du dramaturge allemand Heiner Müller."
ADRIANSTORK (19.04.2022)  
4/5
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Peu avant la première vague du Covid19, Laibach avait signé la partition d'une production théâtrale, "Wir Sind Das Volk (Ein Musical Aus Deutschland)", jouée à Berlin. Celle-ci se base sur le travail du dramaturge allemand Heiner Müller. Les textes d'Heiner Müller sont loin d’être aussi didactiques que ceux de Bertolt Brecht, l'écriture post-moderne de l'auteur de "Hamlet-Machine" ou "Philoktet" est quasi hermétique et témoigne d'un grand pessimisme. Son œuvre s'attache au déclin des civilisations autophages, les nôtres ! Le profil de ce grand homme tourmenté ne pouvait que plaire au groupe slovène. Ajoutons à cela que Laibach avait rencontré le dramaturge en vue d'une collaboration qui n'avait jamais pu être concrétisée en raison de la mort de l'auteur en 1995.

L'album se divise en deux parties distinctes, l'enregistrement studio et une captation live de la pièce de théâtre. Les germanophiles et autres étudiants en art dramatique devront se pencher sur la seconde partie, le jeu des acteurs (en particulier de la comédienne principale) est assez intense, tout en retenue jusqu'à l'ouverture des vannes. Néanmoins, pour les oreilles françaises non habituées aux subtilités de la langue de Goethe, certains passages purement théâtraux et dépourvus de musique laisseront l'ennui s'installer. Cette deuxième partie n'est guère nécessaire et allonge la durée de l'album sans convaincre.

L'enregistrement en studio, long de 47 minutes, se révèle plus intéressant même s'il n'est toutefois pas de tout repos. "Wir Sind Das Volk" est parcouru par des courants étouffants et anxiogènes ('Ich Bin Der Engel Der Verzweiflung') desquels sourdent à la fois menaces (le glas et les bourdonnements de mouches de 'Lessing Oder, le sinistre instrumental 'Im Herbst 197...Starb', les violons et violoncelles spectraux) et promesses de lumière (le thème de piano protecteur qui ouvre l'album). Si l'indus n'explose pas véritablement, il est toutefois présent, tapi dans l'ombre ('Der Vatter','Ordnung Und Disziplin, Müller vs Brecht' qui suinte érotisme et mort). Comme à son habitude, la voix gutturale et murmurante de Milan Fras constitue une véritable balise à laquelle l'auditeur plongé dans ce marais noir peut s'identifier. Il est épaulé dans sa tâche par le fidèle Boris Benko mais surtout Marina Mårtensson. Sa voix cristalline résonne sur les touchants et majestueux 'Medea Material' ou 'Traumwald', qui offrent une goulée d'air frais. Suivant son programme de pervertissement sonore des genres musicaux, Laibach se permet de grands moments caustiques comme 'Flieger Grüs Mir Die Zone', une parodie de chant de cabaret sur un mode opéra, s'achevant sur des rythmiques martiales (on imagine Milan Fras s'amuser de façon pince-sans-rire comme ses yodels sur le précédent album) ou ce final aussi grandiloquent et sucré que sarcastique 'Ich Will Ein Deutscher Sein'.

Si la partie théâtrale est quelque peu superfétatoire, Laibach concrétise son rendez-vous manqué avec Heiner Müller, comme si les deux univers étrangers que sont le théâtre et la musique pouvaient fusionner en harmonie. Laibach, qui n'a pas pour vocation de plaire à tous, réalise un album sombre et inquiétant traversé par des instants de grâce. Tout comme The Residents voire Kiss à une certaine époque, Laibach brode scrupuleusement son concept unique qui dépasse l'art musical. Laibach est-il le plus grand groupe post-moderne ?
- Site officiel

LISTE DES PISTES:
01. Philoktet
02. Der Vater
03. Medea Material
04. Ich bin der Engel der Verzweiflung
05. Flieger, grüß mir die Sonne
06. Ordnung und Disziplin (Müller versus Brecht)
07. Lessing oder Das Ende der Aufklärung
08. Traumwald
09. Im Herbst 197.. starb... (instrumental)
10. Ich will ein Deutscher sein
11. Ich war die Wunde
12. Das Lied vom einsamen Mädchen (live)
13. Im Herbst 197.. starb... (live)
14. Seife in Bayreuth (live)
15. Herakles 2 oder die Hydra (live)
16. Wir Sind Das Volk Nur Durch Die Liebe (abschlussrede Von Peter Mlakar, Live)

FORMATION:
Boris Benko: Chant
Igor Vicentic: Claviers
Janez Gabrič: Batterie
Marina Martensson: Chant
Milan Fras: Chant
   
(1) AVIS DES LECTEURS    
ABADDON
20/04/2022
  0 2  
1/5
Soyons clair : ce projet scénique n’a que très peu de rapport avec la musique (et aucun avec la mélodie). Il s’agit d’une illustration théâtrale de textes du dramaturge allemand Heiner Müller (1929-1995), un auteur très important dans la littérature germanophone, qui a choisi après la guerre de rester en Allemagne de l’Est où il a écrit nombre de textes et pièces de théâtre qui le placent en porte-à-faux vis-à-vis du régime : pour les uns, son œuvre est une critique des sociétés occidentales, tandis que pour d’autres certains de ses textes sont à double sens et critiquent un régime "malade dès sa naissance", ce qui lui vaudra moult censures politiques.

Cette ambiguïté n’est évidemment pas pour déplaire au collectif slovène de Laibach, qui cultive le flou idéologique depuis de nombreuses années, mais d’une manière beaucoup plus douteuse que Müller, puisqu’il prétend dénoncer les totalitarismes en utilisant un habillage totalitariste (fasciste voire national-socialiste), en évitant soigneusement de lever toute équivoque. Laibach présente donc ici une longue pièce "Wir Sind Das Volk" (84 minutes), illustration "musicale" de textes de Müller emballée dans une iconographie elle aussi à double sens, une photographie très travaillée de l’Autrichien Gottfried Helnwein, "Epiphany I: Adoration of the Magi", dans lequel le spectateur pas forcément à l’aise voit une madone et son chérubin exposés au regard inquisiteur d’un groupe d’hommes au choix adorateurs, concupiscents ou voyeurs (à noter que dans cette série de l’artiste, bon nombre de ces hommes sont habillés d’un uniforme nazi).

Voilà pour le décor. Côté musique, comme d’habitude avec Laibach, c’est à peu près le néant, avec toutefois une production moins imprécise qu’auparavant. Certaines pièces sont totalement dépourvues de musique (le sommet : Seife in Bayreuth’, entrecoupé de silences allant jusqu’à 30 secondes…), simples lectures de textes (inutile de dire que pour tout auditeur non-germanophone, c’est d’un hermétisme total). D’autres sont sous-tendues par une orchestration minimaliste où se fait entendre la tendance indus’ du groupe ('Der Vater', Herakles 2 oder die Hydra’), quelques arrière-plans faits de cordes dissonantes ('Im Herbst 197.. starb…’ par exemple). Rares exceptions à cet obscur avant-gardisme, 'Medea Material’ et sa mélodie très simple, ’Flieger, grüß mir die Sonne’, sorte de caricature très pataude de chant de cabaret, et ’Ich will ein Deutscher sein’ au ton confusément ridicule en liaison avec un chant vaguement opératique pas très stable et sans grand rapport avec l’accompagnement.

Autant dire que l’amateur de musique arrive très rapidement à saturation, et se dit qu’il faut à tout prix arrêter de cautionner ce genre de produit qui associe bruitisme instrumental et voix sépulcrale qui psalmodie ou chuchote (Milan Fran, toujours aussi insupportable) : ’Ordnung und Disziplin’ représente ici l’Everest du grand n’importe quoi. Restent la performance d’acteurs ('Herakles 2') et l’importance des textes, qui faute de compréhension ne toucheront hélas pas grand monde.

Pourtant ce genre de production a sa raison d’être : après tout, la provocation a toujours fait partie de la démarche artistique… Quand c’est bien fait, on crie au génie ("L’origine du Monde" de Gustave Courbet, le "Sacre du Printemps d’Igor Stravinsky, le "Boléro" de Maurice Béjart…). Le gros problème avec Laibach, c’est que c’est musicalement et vocalement mauvais, simpliste et mal exécuté. De la constance dans la médiocrité, en somme, car si les Slovènes interpellent, il le font pour les mauvaises raisons et avec un véhicule qu’il conduisent très mal !

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